Retour sur projets 1/2

Je ne sais pas vous, mais j’étais curieuse de savoir comment certains projets dont j’ai déjà parlé avaient évolué au fil du temps. J’avais envie de prendre des nouvelles de ces concepteurs et animateurs de jardins de soins rencontrés ces dernières années. En utilisant ce masculin de convention, je m’aperçois en fait que les femmes sont très actives dans ce domaine. Ce mois-ci, nous retrouvons France Pringuey, Carole Nahon et Jeannine Lafrenière. Le mois prochain, ce sera le tour de Cécile Deschamps, Sarah Bertolotti, Jean-Luc Valot et Alain Flandroit.

 

France Pringuey, la conception et la formation envers et contre tout

Billets d’origine : Première rencontre “virtuelle” en 2014, suivie par une visite à Nice en 2015.

Les projets : chacun son rythme

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Le Jardin des Mélisses au CHU de Saint-Etienne

« Le projet Jardin des Mélisses à Saint Etienne a certainement été ma plus belle expérience dans le domaine parce qu’accompli dans sa méthode de manière réellement professionnelle avec un succès rapide et complet », rapporte France Pringuey. « Ce projet m’a permis de valider le choix d’une méthode de conception participative s’inspirant de l’éthique et des principes de la permaculture. Le programme permet de concevoir à la fois un plan du jardin et un plan de soins conformes aux critères internationaux, répondant aux attentes de l’équipe, dans le respect des valeurs locales et réalisé avec les moyens alloués. » Une grande satisfaction doit également venir de son partenaire dans ce projet, Romain Pommier qui, fin 2016, a soutenu sa thèse sur le thème des jardins thérapeutiques. Un nouveau psychiatre 100% convaincu de la place des jardins dans le soin des patients !

Le projet de jardin à l’IME des Hirondelles de Biot avance, lui, moins rapidement. Mais l’espoir de le réaliser est toujours vivant. Cette expérience et les difficultés rencontrées pour la réalisation du Jardin thérapeutique de l’hôpital de Tende qui dépend du CHU de Nice en très grosses difficultés financières ont conduit France Pringuey à changer d’approche. « Je reviens à mes premiers objectifs : soutenir le personnel, le former, lui donner les moyens ».

L’indispensable formation : personnels soignants, paysagistes et entreprises

France Pringuey s’y investit sur plusieurs fronts. Tout d’abord, elle continue à former des personnels soignants aux concepts scientifiques qui sous-tendent les bénéfices de la relation à la nature (en particulier biophilie et phyto-résonance qui lui sont chères) et leurs applications pratiques au quotidien dans les établissements de soin. « C’est peut être finalement le point le plus important et j’essaie de le développer autant que possible. Je suis soutenue et portée par l’association Recherche et Formation-LIFT dans ce domaine », explique-t-elle. Ainsi au CHU de Tende dans les Alpes-Maritimes, le projet d’aménagement de jardin thérapeutique est en souffrance pour des raisons budgétaires. Mais cela n’a pas empêché une formation pour les personnels soignants en EHPAD et SSR (service de Suite de Soins et Réadaptation accueillant des personnes âgées souffrant de multiples pathologies et dépendantes ou à risque de le devenir).

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Le groupe formé au CHU de Tende dans les Alpes-Maritimes (France Pringuey en tee shirt blanc au centre)

 

« Le groupe projet reste mobilisé et motivé. Il a pris conscience des ressources déjà en place (Jardin de l’hôpital et salle « comme chez soi ») et de leur potentiel pour le soin au quotidien », explique France Pringuey. « Deux sessions de formation axées sur le concept de Biophilie ont permis aux participants de mieux comprendre les bénéfices de la relation à la nature pour l’être humain et ses applications pour améliorer la prise en charge et la qualité de vie à l’hôpital. S’appuyer sur des actions à caractère biophilique stimule les émotions positives et la vitalité, régule le niveau de stress, améliore les capacités d’attention, favorise la créativité au quotidien. » Les soignants sont encouragés à proposer des sorties au jardin aux patients. Pour les plus fragilisés il s’agit de rétablir une prise de contact vitale avec la réalité. Dans les services ils sont stimulés par l’exposition à la lumière du jour, les vues par la fenêtre, l’aération naturelle des chambres, une relation personnalisée au végétal, une installation intentionnée dans la salle « comme chez soi ». « Chez le soignant les actions biophiliques soutiennent l’ouverture à l’autre, une meilleure disposition à l’accueil et au « prendre soin » », conclut la formatrice pour qui il s’agit de faire avancer des projets, mais aussi d’ouvrir les esprits.

Par ailleurs, elle a mené des formations auprès de paysagistes pour les sensibiliser au concept de jardin thérapeutique, aux fondements scientifiques et aux principes de la conception participative à travers des rencontres soignants/paysagistes au CFPPA de Vaucluse. De nouvelles sessions sont prévues en 2017 avec deux niveaux, initiation et perfectionnement. Elle mène également des formations intra-entreprise et des consultations/conceptions de projets pour les jardins de bien-être en entreprise.

Publier et faire connaitre

Fin 2015, France Pringuey intervenait dans une conférence au Salon de l’immobilier d’Entreprise Porte Maillot sur le thème Biophilie et Santé. Oyez, chers lecteurs du Sud. France Pringuey signale un colloque sur les jardins thérapeutiques organisé par le CRES (Centre régional d’éducation pour la santé) le 30 juin 2017 à Marseille : l’appel à poster auprès des équipes soignantes de la région PACA est ouvert jusqu’au 15 avril. Elle y interviendra sur le thème général de l’intérêt du jardin au sein des établissements de soins ainsi que dans une table ronde « Pour la pérennité des jardins thérapeutiques, les différentes animations qui participent aux soins ».

Avec son mari, le psychiatre Dominique Pringuey, elle mène un travail de recherche pour sensibiliser les médecins psychiatres au monde des jardins thérapeutiques. On peut retrouver leurs articles sur Google Scholar (une recherche sur France Pringuey Jardin produit plusieurs articles et posters, dont certains en libre accès).

 

Carole Nahon, des enfants aux personnes âgées

Billets d’origine : le Jardin des (S)ages lancé en 2013 et déjà un retour d’expérience en 2015.

Je reproduis in extenso les commentaires que Carole Nahon m’a fait parvenir sur ses activités de l’année dernière et ses projets de cette année. Une période riche d’ateliers, de partages et d’initiatives du côté de Draguignan.

« Concernant les ateliers en 2016,

  • J’ai poursuivi les ateliers avec les résidents de l’Ehpad. Nous avons organisé une première fête des plantes en mai, proposant à la vente des réalisations de potées fleuries et de plants de basilics et de tomates, la recette étant destinée au budget du jardin du secteur protégé. Petite recette (180 euros) mais fière d’avoir lancé cette journée. Nous avons pu rencontrer les familles, les amis de l’association et leur faire visiter le jardin, leur présenter les résidents qui participaient à l’ateliers.
  • Les activités ont été élargies à la crèche qui accueillaient ma petite fille. Là, l’accueil de très jeunes enfants m’a montré que je ne me trompais pas en créant cette activité. Si certains comportements m’ont rappelé les résidents plus âgés, j’ai pu constaté le grand intérêt des tous petits pour le jardinage. Mettre les mains dans la terre, toucher l’eau, arroser les plantes, les voir pousser, grandir et les déguster est très enrichissant. Chaque enfant est reparti avec un bouquet de basilic à la maison. Les retours des éducatrices ont été très positifs, attente de l’atelier, rappel pour certains de l’activité jardin montrent à quel point cela leur faisait du bien. Du côté des éducatrices, l’activité est un grand bonheur pour elles, elles observent les enfants avec un autre oeil et ont constaté que certains, parfois réservés, pouvaient être très présents dans l’activité. Ces ateliers sont aussi bénéfiques pour elles!

 

  • Concernant le projet d’amélioration du jardin de l’unité protégée, c’est un peu moins bien. Il n’a pas beaucoup avancé, enfin pas dans le sens que nous aurions voulu, les animateurs et moi. La direction a répondu à un appel à projet (qu’elle a décroché) très contraignant dans la mesure où les  travaux engagés se feraient à condition qu’ils soient fait en dur. Ce qui a profondément modifié l’aspect du jardin. Plus de kiosque en fer forgé, plus de pergola légère…Ne maîtrisant pas ce budget, j’attends que les travaux soient terminés (ils ont commencé en janvier) pour revoir ceux du jardin, à proprement parlé. Nous envisageons de faire une fête de ce jardin avec les partenaires. Le crédit agricole, mes amies Soroptimist qui nous ont remis un chèque de 1115 euros et mon ami pépiniériste qui nous fournira les plantes et les représentants de la commune, bien entendu.
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Travaux au jardin

Depuis septembre, j’interviens au PASA. Les ateliers sont très intéressants parce que le suivi est efficace; l’arrosage, le désherbage font l’objet d’activités entre les ateliers et pour certaines des résidentes, ce sont des moments précieux et apaisants.

En novembre, accompagnées des Soroptimists et d’un bénévole de l’association de visiteurs de malades, nous avons désherbé puis végétalisé un mur que les résidents pourront voir fleurir, un peu je l’espère au printemps et en été. Jusque là ce n’était qu’un mur gris envahi de mauvaise herbe…

Et en 2017

A la fin du mois de février, j’ai commencé une activité dans une résidence pour personnes âgées. J’interviendrai une fois par mois, sur la journée. Je me réjouis d’avance car ces personnes sont plus valides, donc plus mobiles. Nous pourrons les emmener acheter les plantes qu’elles auront choisies, et j’envisage aussi la visite dans un beau jardin de la région.

Nous allons réitérer la journée des plantes fin mai, en élargissant le cercle aux autres associations qui interviennent dans la structure, avec repas et goûter pour les familles.

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Le jardin de la crèche. Les enfants ont la main verte!

Et enfin, la crèche m’a proposé de réfléchir à des interventions dans d’autres crèches du réseau « La maison bleue ». Je formerais les éducateurs-trices aux ateliers de jardinage. Challenge intéressant, non?

 

Jeannine Lafrenière inaugure un mur vivant au Québec

Billet d’origine : présentation de la Fondation Oublie pour un instant en 2015.

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Jeannine Lafrenière entourée de partenaires qui ont permis la réalisation du premier mur vivant québécois en milieu de santé.

Jeannine Lafrenière continue à puiser dans son expérience personnelle pour guider ses projets. C’est en accompagnant sa mère en maison de retraite qu’elle se rend compte de l’importance d’amener la nature à l’intérieur à cause des hivers canadiens très froids. Dans un très beau billet intitulé La dernière leçon de ma mère, elle raconte la création d’un mur végétal au Centre Bon Séjour à Gatineau au Québec. L’inauguration a eu lieu le 2 mars. Le projet est présenté sur le site de la Fondation et dans un article suite à l’inauguration.

« Les personnes du Centre Bon Séjour à Gatineau (Québec) pourront pour la première fois profiter de la Nature auprès d’elles sans avoir à se risquer dehors. Et malgré les rigueurs de l’hiver, elles pourront apprécier jour après jour tous les bienfaits que seule la Nature peut leur apporter. Leur saison d’hiver sera différente cette année et toutes les années à venir », se félicite Jeannine Lafrenière. Sa mère ne pourra pas en profiter, elle s’en est allée il y a quelques semaines. Mais elle serait fière du projet de sa fille.

Beaucoup de beaux projets, beaucoup d’énergie et beaucoup de personnes touchées grâce aux efforts de ces pionnières passionnées. Au mois prochain pour la suite.

 

 

 

Deux formations en 2016

Pour ceux qui ont envie de se former à la conception et à l’animation d’un jardin thérapeutique ou jardin de soin, il existe peu d’options en France. Voici les deux formations principales, ouvertes à tous, car il existe aussi des formations intra-établissement comme celles proposées par Sébastien Guéret de Formavert. Sous oublier la formation « Découverte de l’horticulture thérapeutique » de Sébastien et al. qui se déroulera du 7 au 10 mars.

En attendant un potentiel Diplôme d’Université en hortithérapie qui serait en projet à l’Université de Toulouse, mais au sujet duquel je n’ai pas pu obtenir de détails.

Initiation à l’hortithérapie – Université de Toulouse

Cette formation de 7 jours s’adresse surtout aux soignants : psychologues, psychothérapeutes, médecins (toutes spécialités), paramédicaux, travailleurs sociaux, éducateurs, animateurs. Elle existe depuis plusieurs années et a été initiée par le psychologue Jean-Luc Sudres. Voici la définition qui sert de base à cette formation : « L’Hortithérapie est la réhabilitation pratique et globale de la personne par l’utilisation des plantes et la relation avec les différents éléments de la nature dans un cadre aménagé, inclus dans un programme spécifique s’adressant à divers publics et troubles. Largement utilisée en Grande-Bretagne, au Québec et aux USA cette pratique s’étaye sur des preuves et bénéfices allant du bien-être à la thérapeutique. » Pour le programme et les intervenants, consultez le site ou ce pdf Initiation à l’hortithérapie.

La prochaine session a lieu du lundi 14 mars au jeudi 17 mars 2016 et du lundi 2 mai au mercredi 4 mai 2016. Aux dernières nouvelles, il restait quelques places.

Contacter l’Université de Toulouse Jean Jaurès, Aude Font, gestionnaire Formations, aude.font@univ-tlse2.fr, 05 61 50 42 29

Plusieurs formations courtes au Centre de Formation de Chaumont-sur-Loire

Depuis 2012, Anne et Jean-Paul Ribes, actuellement entourés de Paule Lebay et de Dominique Marboeuf, mènent deux fois par an une formation sur les jardins de soin et de santé dans le cadre exceptionnel du domaine de Chaumont-sur-Loire. L’année dernière, l’offre s’est étoffée avec une formation à l’animation des jardins de soin. Voici toutes les sessions proposées cette année. Attention, deux sessions sont déjà complètes : « Jardin de soin et de santé » du 10 au 12 mai et « Atelier d’animation autour des plantes » du 7 au 9 juin. La description des différentes formations est disponible en ligne ou en cliquant sur le titre de chaque thème.

Jardin de soin et de santé

– Session 1 : du 10 au 12 mai 2016

– Session 2 : du 4 au 6 octobre 2016

Conception et réalisation d’un jardin de soin et de santé

– Session 1 : les 24 et 25 mai 2016

– Session 2 : les 8 et 9 septembre 2016

Atelier d’animation autour de l’osier

– Session 1 : les 1 et 2 juin 2016

– Session 2 : les 6 et 7 octobre 2016

Atelier d’animation autour des plantes : de la théorie à la pratique

– Session 1 : du 7 au 9 juin 2016

– Session 2 : du 21 au 23 septembre 2016

Contacter Chaumont, Informations auprès d’Hervé Bertrix, responsable de la formation, herve.bertrix@domaine-chaumont.fr, 02 54 20 99 07

La formation : quel diplôme ?

C’est un plaisir d’accueillir Stéphane Lanel, l’animateur du Jardin d’Epi cure à Maule (78), dont vous avez déjà entendu parler plusieurs fois, notamment ici et . Il aborde le sujet de la formation à travers son expérience personnelle et ses réflexions sur le sujet. Félicitations, avec un an de retard, pour l’obtention de son Bac Pro et bon courage pour la reprise de nouvelles études en septembre. Quel bel exemple !

 

Vaste question que celle de la formation des personnes intervenant dans les jardins à visée thérapeutique ou dit « de soins ».

Tout d’abord, je me présente: je m’appelle Stéphane Lanel et je suis animateur du « Jardin d’Epi cure » (et membre de l’association du même nom) depuis l’hiver 2011 dans un foyer médicalisé accueillant des adultes cérébro-lésés. Ce jardin offre la possibilité aux résidents d’aménager cet espace, de l’entretenir et de le faire évoluer. Mais également, de semer, planter, soigner, cueillir, récolter et transformer fleurs, fruits et légumes. Pour enfin consommer, offrir et partager.

Stéphane Lanel

Stéphane Lanel

En novembre dernier, j’ai participé au 4ème symposium international sur les jardins de soin au cours duquel l’une des thématiques abordée était la formation. J’ai pu constater à quel point le monde des soignants et celui des entrepreneurs (architectes, paysagistes, pépiniéristes, etc) avaient vraiment du mal à cohabiter dans « l’écosystème » du jardin de soins. Ces deux mondes sont dans une défiance et méfiance réciproques. Actuellement aucun n’ayant trouvé sa « niche écologique », nous en sommes encore au stade où chacun veut marquer et protéger son territoire. Pourtant ils doivent et devront trouver un terrain d’entente s’ils veulent travailler ensemble.

Je pense que le jardinier de soins (terme que je préfère au pompeux « hortithérapeute ») est plutôt un hybride qui peut prendre le meilleur des deux, et cela au service des personnes dont il s’occupe.

Hortithérapeute ? 

IMG_2141Avant tout, je voudrais m’arrêter sur le mot « hortithérapeute ». Tout ceux qui jardinent en institution le savent, pour l’avoir expérimenté : le jardin est de facto thérapeutique. Mais il me semble que nous ne devons pas usurper un titre qui n’est pas le nôtre. Je rappelle qu’il n’existe actuellement en France aucun diplôme d’hortithérapeute référencé au Répertoire National des Certifications Professionnelles. Ce n’est donc ni un diplôme, ni un métier reconnu par l’État.

Si nous voulons nous faire accepter des institutions, ne nous parons pas de ce titre. Je le dis pour avoir entendu si souvent des animateurs de jardins de soins se présenter et parler en tant qu’hortithérapeutes. J’ai également entendu les réticences de chefs d’établissement et de thérapeutes certifiés (qui, je le rappelle, ont fait au minimum 3 années d’études dans leur spécialité) très sceptiques à cause de l’emploi de ce terme. In fine, je pense que cela dessert la cause que nous sommes sensés servir.

Malgré cette non reconnaissance officielle, il n’en reste pas moins que nous sommes là au quotidien, auprès de ceux qui souffrent et qu’il y a une nécessité impérieuse de formation. Mais quelle(s) formation(s) ? Permettez-moi de vous parler de mon parcours personnel.

La nécessité de se former

Avant la création du jardin à la Maison des Aulnes, j’exerçais depuis une bonne dizaine d’années la profession d’Aide Medico-Psychologique. Je n’avais absolument aucune compétence en matière de jardinage, ni aucune empathie pour le monde végétal. Mais la rencontre avec Bruno, un résident du foyer, a réorienté à jamais ma vie. Il fut le premier à me vanter l’action bénéfique du jardinage sur ses propres troubles du comportement, semant ainsi une graine qui germât jusqu’à la réalisation du projet du Jardin d’Epi cure.

Dès le début de sa création, je me suis retrouvé face à mes propres limites techniques pour animer une activité de jardinage et en difficulté face à des résidents parfois très connaisseurs (je me souviens notamment d’un ancien paysagiste).

C’est pourquoi j’ai décidé dès 2012 de me former. Anne Ribes m’a tout de suite recommandé l’ESA (École Supérieure d’Agriculture) d’Angers pour la qualité de son enseignement et la possibilité de suivre une formation à distance (ma situation professionnelle et familiale ne me permettant pas de suivre une formation continue en présentiel).

J’ai donc pris contact avec l’école. Mon niveau d’études Bac +4 m’autorisait l’accès au Bac pro en classe de Première sans passer par la Seconde ainsi qu’au BTS. J’ai choisi le baccalauréat professionnel pour jouer la carte de la sécurité : j’étais conscient de la charge de travail à fournir dans les deux cas et je ne voulais surtout pas me surcharger au risque d’abandonner en cours de route. De plus, partant de zéro, il me fallait acquérir les bases.

Obstacles sur le chemin

Il m’a fallu d’abord affronter plusieurs difficultés.

> La première à été de choisir le Bac pro qui me convenait… En effet deux spécialités correspondaient aux activités proposées au jardin d’Epi cure :

  • Aménagements paysagers, qui concerne la création et les entretiens des espaces végétalisé
  • Productions Horticoles, qui concerne la floriculture, le maraîchage, etc.

J’ai choisi les aménagements paysagers sous les conseils d’Anne Ribes qui avait elle-même étudié cette spécialité mais aussi car le jardin d’Epi cure était dans sa phase de création.

> La seconde difficulté a été de gérer la problématique du stage en milieu professionnel obligatoire de six semaines à effectuer sur une année. Pour quelqu’un qui ne bénéficie que de cinq semaines de congés annuels, le problème était de taille… Ma chance a été d’avoir eu la possibilité de prendre « Le jardin d’Epi cure » comme lieu de stage et Anne Ribes comme maître de stage.

Malgré tout, ça n’a pas été facile à faire valider par la responsable pédagogique du CERCA (pôle de formation de l’ESA) qui ne comprenait pas le sens de ma démarche dans cette reprise d’études. Elle n’arrivait pas à comprendre le sens de mon stage car je me destinais à utiliser ces compétences avec des personnes amatrices (avec toute la charge péjorative que peut prendre ce mot), de surcroît handicapées plutôt qu’à entrer dans une logique professionnelle classique basée sur des rapport commerciaux et hiérarchiques. Je rappelle que le titulaire d’un Bac pro est habilité à créer son entreprise et/ou à encadrer une équipe d’ouvriers.

> La troisième difficulté a été de pouvoir assister aux sessions de regroupement à l’ESA d’Angers (six regroupements d’une semaine chacune sur les deux années). Là, je n’avais d’autre solution que de m’y rendre en prenant sur mes congés payés.

> La quatrième et dernière difficulté, et non des moindres, a été le financement… Notre beau système français de formation continue étant ce qu’il est, deux solutions s’offraient à moi:

  • Faire une demande de CIF (Congé Individuel de Formation) et attendre une prise en charge à 100% dans un délai pouvant aller de 3 à 10 ans.
  • L’auto-financement.

Je n’ai eu donc d’autre solution que cette dernière, mais pour régler les frais annuels de scolarité (1200 €) le CERCA propose des facilités de paiement très intéressantes.

Le cursus du Bac pro AP

  • Contenu des cours théoriques

J’ai reçu en novembre 2012 les manuels scolaires. Très bien faits, mais malheureusement édités en noir et blanc. Ma première impression a été la panique face à la quantité de nouvelles connaissances à intégrer, avec une mention spéciale pour la biologie végétale et la reconnaissance des végétaux (en latin, s’il vous plait!!!!). Mais je dois dire qu’à l’issue de la formation, ce sont les deux matières que j’ai préférées et qui m’ont le plus apporté.

Dès la réception de ces contenus pédagogiques, il m’a fallu m’imposer une discipline stricte dans l’étude des matières (1h30 quotidienne minimum) et la réalisation des devoirs (un quota étant exigé pour le passage en terminal).

Les 2 premiers mois, la tête dans le guidon, j’avais l’impression de ne rien apprendre et d’être submergé par la charge de travail. Et sans comprendre pourquoi, j’ai réalisé un jour que les connaissances commençaient à faire sens dans ma tête et que des connections s’établissaient entre les différentes matières. Cette prise de conscience m’a permis de garder ma motivation jusqu’au bout de la formation.

  • Sessions de regroupement

Je me suis rendu à la première session de regroupement en décembre. Expérience très étrange que de se retrouver à l’école le jour avec des adultes et à l’hôtel la nuit, loin de ma famille. Mais expérience très enrichissante, avec des cours extrêmement condensés et des horaires de cadre, le tout dans une ambiance studieuse. Et à l’instar de tout lycée, des profs pédagogues, passionnés et passionnants (biologie végétale) et d’autres moins…

Et après ?

En juin 2014, j’ai obtenu mon diplôme avec une belle mention. Mais concrètement quels ont été les bénéfices concrets de cette formation au service du jardin d’Epi cure ?

3Je me suis rendu compte tout au long de ces deux années que l’acquisition de compétences me permettait de m’affranchir de plus en plus des contraintes techniques, pour une meilleure animation des séances. Cela s’est avéré encore plus tangible dans l’activité pédagogique qui accueille des enfants de l’école élémentaire et du centre loisirs de la commune avec leurs cortèges de « pourquoi ».

J’adore également la philosophie sobre, humaniste et joyeuse d’Epicure et, pour moi, le Jardin est un formidable espace philosophique, il est le support d’une multitude de réflexions métaphoriques. L’acquisition de ces connaissances m’a donné des clefs pour faire parler ce monde.

Malheureusement (ou heureusement), j’ai depuis touché les limites de cette formation. Le jardin étant un écosystème résilient, il doit être appréhendé dans sa globalité. En effet, ouvrir une porte de l’univers du vivant c’est se retrouver devant une autre, puis une autre, puis une autre…

IMG_1917Le Jardin d’Epi cure, n’a cessé d’évoluer depuis 2012: les activités et l’espace de production légumière se sont développés (notamment pour la cuisine thérapeutique) et une parcelle dédiée aux Restos du Cœur a été créée. Et malgré mes lectures et la documentation sur le maraîchage et la production horticole en général, j’éprouve encore cette nécessité de formation. En septembre, je commencerai une formation de jardinier permaculturel à la Ferme du Bec-Hellouin en Normandie. Et j’espère me lancer en 2016-2017 dans un BTS Production Horticole à dominante Agriculture Bio. Boulimique ? Peut-être. Passionné, certainement ! Dans tous les cas, voir le projet du Jardin d’Epi cure avancer avec l’investissement, l’enthousiasme et la joie des résidents me donne envie d’offrir à ce projet le meilleur de moi-même.

Conclusion

Voici mon expérience personnelle, qui n’est que ce qu’elle est, et surtout liée au contexte et au public particulier du jardin d’Epi cure. Je souhaite à chaque personne prenant en charge des personnes vulnérables dans le cadre d’un jardin de soins de trouver SA formation adaptée à ses variables. En conclusion, je pourrais dire que se lancer dans une formation reste une aventure vitale qu’il faut vivre pour se nourrir soi et nourrir les autres en retour.

 

Formations : état des lieux, partie 1/3

Une formation à l’hôpital Montperrin à Aix animée par Martine Brulé (à droite)

Une formation à l’hôpital Montperrin à Aix animée par Martine Brulé (à droite)

« Où puis-je me former? » C’est la question que me posent le plus souvent les lecteurs qui me contactent. C’est une question centrale dans le développement du jardin thérapeutique en France où il n’existe pas encore de formation diplômante ou certifiante dans cette discipline. Je leur réponds dans la mesure de mes connaissances, mais il est temps de formaliser et de rassembler cette information pour le bénéfice de tous. Cette semaine, nous commençons avec les formations de Martine Brulé et de Jocelyne Escudero. Dans une 2e partie, on découvrira les formations de Sébastien Guéret et celles d’Anne et Jean-Paul Ribes, qui travaillent d’ailleurs souvent ensemble. Enfin, une 3e partie sera consacrée à quelques autres pistes évoquées par les précédents. Le champ est à la fois les formations ouvertes à tous et les formations en intra-entreprise. Merci à eux tous de m’avoir présenté leurs formations.

Martine Brulé : des formations avec l’ANFE, entre autres 

Pour le parcours de Martine Brulé, architecte paysagiste et praticienne en hortithérapie depuis environ 2003, je vous renvoie à ce portrait publié en octobre 2012. Aujourd’hui, elle propose des formations inscrites au catalogue de l’ANFE, l’Association Nationale Française des Ergothérapeutes et dispensées, en Intra dans des établissements de santé, EHPAD et CHU pour la plupart. Ces formations s’adressent au personnel soignant. Cette semaine, elle organise du 5 au 7 mai une formation en inter au siège de l’ANFE, pour un public qui souhaite s’inscrire à titre individuel.

Le programme de la formation en intra

Le programme de la formation ouverte à tous (en espérant qu’elle soit de nouveau proposée en 2015)

« Je dispense une formation actuellement au CCAS de Toulon, dans le cadre d’un marché public. Une formation sera présentée également en mai, au CHU de Nice, service Psychiatrique, au bénéfice du personnel soignant de ce service. Ce personnel soignant accompagne les patients dans le cadre des ateliers d’hortithérapie que j’anime, depuis le début de l’année 2014 », explique Martine Brulé qui est basée à Grimaud dans le Var.

Contacter Martine Brulé :

http://vivharmonie.com

brule.martine@vivharmonie.com

 

Jocelyne Escudero : une palette de formations en établissements et pour tout public

Nous avions également eu l’occasion de faire connaissance avec Jocelyne Escudero en juin dernier. C’est à partir de 2001-2002 qu’elle commence à former des équipes à travers des interventions intra-établissements via son association Trace et Couleurs. En parallèle, elle œuvre pour la reconnaissance de l’hortithérapie par ses écrits (communication « Hortithérapie: spécificité d’une pratique et intérêt thérapeutique » aux journées de la Société Internationale de Psychopathologie de l’Expression et d’Art-thérapie en 2002, publiée dans l’ouvrage collectif « La personne âgée en art-thérapie », L’harmattan 2004 par exemple).

Trace et Couleurs, organisme de formation depuis 1998, organise des formations en Hortithérapie et Jardins thérapeutiques depuis 2001 pour accompagner à la méthodologie et au suivi de projets les établissements (EHPAD, Hôpitaux, Foyers, Associations …).

La formation en « Hortithérapie » en 3 modules (le module 1 peut être suivi indépendamment des modules 2 et 3) dont Jocelyne Escudero est l’auteure existe depuis 2001. Les formations incluent la méthodologie de projet, l’évaluation et la transmission des résultats.

  1. « Sensibilisation à l’hortithérapie » (module 1): Aspects généraux théoriques  et  pratiques de l’hortithérapie  a lieu les 17, 18, 19  et 20 juin 2014 à Figeac, 46.
  2. « Jardins de santé et hortithérapie » (module 2) : Approfondissement des pratiques (réservé exclusivement aux personnes ayant suivi le module 1) a lieu les 23, 24, 25 et 26 juin 2014, près de Figeac.
  3. « Jardins de santé, hortithérapie et créativité » (module 3): Approfondissement des pratiques (réservé exclusivement aux personnes ayant suivi le module 1& 2) a lieu les 9, 10, 11 et 12 septembre 2014, près de Figeac.

La formation aux « Jardins thérapeutiques » a lieu les 19, 20, 21 et 22 mai 2014 en banlieue toulousaine.

La formation au « Jardin médicinal »: le bien-être par les plantes a lieu les 27, 28, 29  septembre près de Figeac.

Les interventions de formations en intra-établissement sont réalisées à la demande, toute l’année. Elles sont adaptées au projet de l’établissement et des équipes. Ces formations sont ouvertes à tout public. Parmi les établissements avec lesquels Jocelyne Escudero a travaillé, l’Université de Toulouse Mirail (Centre Universitaire de Perfectionnement en Psychologie Appliquée), Hôpitaux, I.M.E., E.H.P.A.D, AMAPEI,  PREPS Corse,  Centre National de la Fonction Publique Territoriale, CEMEA …

Contacter Jocelyne Escudero :

http://hortitherapie.avenir.over-blog.com

http://traceetcouleurs.free.fr

traceetcouleurs@gmail.com

 

News flash : formation à l’IRTS de Franche-Comté du 19 au 23 mai

Présentée comme une nouvelle formation, elle s’intitule « Concevoir, utiliser, évaluer un jardin à visée thérapeutique : le projet d’une équipe ». Parmi les intervenants, le professeur Thérèse Jonveaux du CHU de Nancy qui y donnera une conférence publique. Voici la plaquette qui donne le contexte général et quelques détails sur le contenu de ces 5 jours qui se dérouleront en partie dans le cadre magique de la Saline royale d’Arc-et-Senans.

 Contacter Brigitte Griffon, responsable de la formation:

brigitte.griffon@irts-fc.fr