Des jardins qui nous réconfortent

Annie KirkP. Annie Kirk est une architecte paysagiste pas tout à fait comme les autres. Cette éternelle étudiante a commencé sa carrière comme travailleuse sociale au contact de patients atteints de graves troubles mentaux. C’est avec eux qu’elle se rend compte que travailler à l’extérieur peut avoir des effets bénéfiques sur le cerveau. Sa prochaine étape sera dans une compagnie biomédicale qui fabrique des pacemakers. Là, elle renforce son idée que l’exercice, et particulièrement l’exercice à l’extérieur, est bénéfique pour le cœur. Entre temps, elle accompagne son père en fin de vie. La vue sur les collines et le soleil couchant depuis sa chambre d’hôpital leur apporte à tous les deux un réconfort inestimable dans l’atmosphère inhospitalier de l’hôpital. Lorsque survient une rupture amoureuse douloureuse peu de temps après, c’est encore le jardin qui lui offre du réconfort.

Annie décide de reprendre des études pour devenir architecte paysagiste avec l’envie de creuser cette forte intuition que notre environnement influence notre état psychologique. A l’université de Tucson en Arizona où elle étudie, elle rencontre le professeur Ervin Zube qui est un des pionniers dans le domaine de la perception des paysages. « J’étais à un carrefour de toutes les expériences dans ma vie. Je me suis dit que je ne devais pas être la seule à chercher du réconfort dans la nature », explique Annie. « Mon travail aujourd’hui est l’expression de ce que je sais dans mon cœur. » Dans sa pratique au sein de son entreprise Red Bird Restorative Gardens, elle crée des jardins qui apportent réconfort et répit. « Je ne vais pas jusqu’à dire que ce sont des jardins qui soignent car c’est personnel. » Annie préfère donc parler de « restorative gardens » plutôt que de « healing gardens » réservés à des patients. Elle conçoit des jardins qui agissent comme un remontant, un fortifiant sur ceux qui les fréquentent.

Le nom de sa compagnie, « Red bird », fait référence à une expérience d’enfance qui a marqué Annie. Arrivée en retard à l’école, elle doit dessiner seule un oiseau pendant que les autres enfants sont en récréation. Au moment de partager son travail, elle s’aperçoit que tous les enfants ont dessiné des oiseaux bleus. Le sien est le seul oiseau rouge. Ce à quoi la maitresse répond à la petite fille un peu sous le choc « Annie, on a aussi besoin d’oiseaux rouges ». Une leçon qui enseigne à Annie la valeur d’être différente et de suivre ses envies.

Un jardin créé pour une maison inspirée par le style de l'architecte Frank Lloyd Wright près de Portland

Un jardin créé pour une maison inspirée par le style de l’architecte Frank Lloyd Wright près de Portland

Annie est bien consciente que le retour à la nature, l’engouement pour tout ce qui est vert est une tendance de ces dix dernières années, tendance qui n’a pas échappé à une certaine récupération marketing. « Mais il y a un changement fort dans les consciences. Plus on en parle, plus cela devient accepté. Une vérité universelle est que la nature est notre point commun à tous. Nous avons tous une relation à la nature. » Elle constate que la génération des baby boomers montre de l’intérêt pour la création d’environnements dans lesquels ils se sentent bien. « La psychologie environnementale et les jardins thérapeutiques sont un produit des années 60 et 70. Il y a cette idée que se sentir bien affecte notre santé de manière positive. »

Avec Red Bird Restorative Gardens, elle travaille donc directement avec des particuliers pour concevoir avec eux leur « restorative garden ». Qu’entend-elle par là ? « Ces jardins ne sont pas pour moi. Ce ne sont pas des jardins qu’on peut voir dans des magazines. Ce n’est pas une question de faire un beau jardin dans un certain style ou une certaine esthétique », explique-t-elle. « C’est un jardin qui a du sens pour cette personne et qui évoluera. Ce sont mes clients qui pilotent le dessin sur croquis. Je prends le temps d’écouter leurs intentions. Elles peuvent apparaître plus tard dans nos conversations. Il faut arriver à comprendre ce qui leur donne ce sens de bien-être. »

« Je suis une matrice de 27 éléments présents dans un jardin thérapeutique que j’ai développée, sur les principes de Clare Marcus Cooper, pendant que j’écrivais ma thèse », raconte Annie. « Par exemple, il y a un principe qui veut que 60% de plantes dans un espace donne une impression agréable physiquement, émotionnellement, physiologiquement, spirituellement. Mais un espace qui a trop de plantes différentes rend le travail difficile pour notre cerveau qui doit organiser tout cela. Il faut donc apporter de l’ordre. » Un autre des principes qu’Annie cherche à respecter est la cohabitation d’espaces collectifs et d’espaces privés. « Une partie primitive de notre cerveau a besoin d’un espace dans lequel se réfugier. Il faut créer cette possibilité dans le jardin. Il faut aussi intégrer la dimension du jeu car, dans nos souvenirs d’enfance, le jardin est souvent lié au jeu, à une cabane dans un arbre. »

Un projet d'Annie pour la villa Sacred Heart, une résidence pour personnes âgées indépendantes à Portland (Oregon)

Un projet d’Annie pour la villa Sacred Heart, une résidence pour personnes âgées indépendantes à Portland (Oregon)

Depuis 2005, Annie s’intéresse plus particulièrement aux vétérans. « J’ai travaillé avec des vétérans du Vietnam au début de ma carrière dans la santé mentale. J’avais l’impression que nous allions vivre quelque chose de complètement différent avec les guerres d’Afghanistan et d’Irak et qu’il fallait apporter au Veteran Administration (VA) toutes les clés possibles sur le sujet des jardins thérapeutiques et d’un environnement médical qui apporte un soutien à la guérison », se souvient Annie. Cette année-là, elle organise avec l’American Society of Landscape Architects une conférence au VA de Miami où sont conviés des médecins, des personnels d’hôpitaux du VA et des vétérans dont quelques-uns qui commencent à revenir d’Irak. « Leurs blessures sont souvent liées à des traumatismes crâniens et à la mobilité », constate Annie. « Nous avons envoyé les minutes de la conférence à tous les thérapeutes horticoles que nous avons pu identifier dans les hôpitaux VA. »

En 2012, elle a présenté un état des lieux à une conférence au Chicago Botanic Gardens sur les dernières études sur le syndrome PTSD et les traumatismes crâniens. Elle s’intéresse désormais au rôle de la communauté au sens plus large dans la réhabilitation des vétérans et de leur famille. « Le VA ne peut pas s’occuper des familles qui sont aussi traumatisées. Il faut faire quelque chose pour les familles. Quant aux vétérans, il y a beaucoup de preuves que travailler dans des fermes les aident à se remettre. C’est un mouvement. On se rend compte qu’en combinant de bons soins médicaux et une activité basée dans la nature, on améliore leur réhabilitation. »

Des particuliers qui veulent trouver un havre de paix dans leur jardin personnel aux soldats qui ont besoin de se reconstruire physiquement et psychologiquement, la nature est une source de réconfort comme Annie et beaucoup d’entre nous peuvent personnellement en attester.

Joyeuses fêtes à tous. Le solstice d’hiver est derrière nous. Que la nature, même endormie, vous apporte ses bienfaits pendant les jours à venir. A l’année prochaine.

Talégalle plante des jardins en maisons de retraite et dans les écoles

Concevoir, créer et animer des jardins à but thérapeutique dans des établissements de soins et des jardins à but pédagogique dans les écoles, telles sont les missions de Talégalle, une association à but non lucratif qui a vu le jour en août 2011. Plus poétiquement, elle se donne pour objectifs d’éveiller les sens, de s’émerveiller du vivant, de faire germer des sourires. Une explication sur le nom de l’association, issue tout droit de son site, « Les Talégalles sont de curieux oiseaux qui ramassent feuilles mortes et débris organiques, pour former un tumulus dans lequel ils déposent leurs œufs, et dont la matière en décomposition fournira la chaleur nécessaire à leur incubation. Cet oiseau, qui prend soin du vivant en prenant soin de la terre, est le symbole de notre association. »

Derrière la jeune association, une équipe transversale. Au départ, un architecte paysagiste en fin d’études à l’ENSP de Marseille, Vincent Prévost, et un éco-éducateur qui a travaillé dans des jardins partagés et d’insertion, Mathieu Yon. Mais aussi Caroline Berlemont, une éducatrice spécialisée qui préside l’association, Tania Gadenga, professeur des écoles en disposition très branchée Land Art, et quelques autres bénévoles. Ce sont ces compétences variées qui font la force de Talégalle pour aborder ses projets avec une vision collective.

Mathieu Yon de l'association Talégalle pendant un atelier de jardinage

Mathieu Yon de l’association Talégalle pendant un atelier de jardinage

Mathieu est la colonne vertébrale de l’association. Philosophe de formation et après un master Ethique et Développement Durable à Lyon, il fait un passage par l’association Les Colibris de Pierre Rabhi, puis travaille à Paris dans le Jardin sur le Toit, un jardin de 1000 m2 sur le toit d’un gymnase du 20e arrondissement ou encore dans les Jardins du Béton à Montreuil avec des demandeurs d’asile afghans. C’est là qu’il récolte le titre d’éco-éducateur. C’est là aussi que germe l’idée de mêler jardin et social, avec l’envie de s’adresser surtout aux maisons de retraite et aux écoles.

« Dans les institutions, il est plus facile de faire un parcours de santé. Ce n’est pas de la mauvaise volonté, c’est juste que cela leur semble plus simple. Mais nous défendons l’idée de participer et de jardiner », explique Mathieu. « Il faut des animations pour que le lieu vive, pour qu’il y ait une relation au jardin. Notre but est de faire entrer du vivant, ce ne sont pas des projets d’aménagement. » Un financement du Fonds Social Européen a permis à Talégalle de mettre le pied à l’étrier et de travailler pendant 8 mois sur un projet dans un PASA (Pole d’activités et de soins adaptés) à Valence où les personnes âgées ont nommé leur jardin Le Jardin de l’espoir. Ailleurs, dans une structure d’accueil de Jour à l’hôpital de Bagnols-sur-Cèze, l’association anime une activité de Land Art. L’activité artistique à base de matériaux naturels peut se pratiquer à l’intérieur avant d’installer les réalisations dehors où elles sont exposées aux éléments.

Talégalle, qui intervient dans un rayon autour de son siège à Crest dans la Drôme, s’apprête à voler de ses propres ailes lorsque le financement du FSE prendra fin au printemps 2013. Elle a développé un projet pour des adultes polyhandicapés au sein d’un hôpital psychiatrique. « A l’hôpital, ils sont contents de faire rentrer un bol d’oxygène. Nous avons un retour très positif des psychiatres même si on préfère éviter le mot thérapeutique et parler plutôt de jardins de soin », explique Mathieu. Pour ce projet, Talégalle attend que les services techniques de l’hôpital réalisent les travaux.

Dans le Jardin de l'espoir au PASA de Valence, on met les mains dans la terre.

Dans le Jardin de l’espoir au PASA de Valence, on met les mains dans la terre.

« Avec le plan Alzheimer et les PASA, les jardins de soin pour les personnes âgées sont en plein développement. Les écoles montrent du potentiel, mais n’ont pas de budget. Dans les hôpitaux, il n’y a pas encore le même mouvement que dans les maisons de retraite. On aimerait aussi intervenir dans le milieu carcéral ou dans le domaine de la délinquance », résume Mathieu. Pour devenir pérenne et dépendre le moins possible de subventions, la jeune association doit développer sa « grille tarifaire » : 30 euros de l’heure pour les écoles et 40 euros de l’heure en maisons de retraite pour une intervention de trois heures. Il lui faut aussi commencer à facturer ses services dès la phase de conception.

« Talégalle, des jardins aux petits soins » comme l’annonce le slogan de l’association…Une association qui a envie de créer des jardins qui stimulent le geste, la mémoire, l’imaginaire en impliquant résidents et personnels.

Dans les écoles aussi, on met les mains dans la terre.

Dans les écoles aussi, on met les mains dans la terre.

Symposium Jardins & Santé : l’incroyable exubérance de l’hortithérapie en France

Chose promise, chose due, mais le temps a été une denrée rare depuis deux semaines. Dans l’effervescence du lancement de California Dream 3D et des trois concerts de The Ruse organisés autour de la sortie, difficile de trouver un moment pour se poser. C’est bien la première fois depuis le lancement de ce blog que je loupe une semaine, mais les journées ne sont pas extensibles. A l’impossible, nul n’est tenu pour conclure ces excuses sur un autre proverbe.

Mais revenons sur le 3e symposium de l’association Jardins et Santé. Depuis 7 ans, cette association composée de « bénévoles, issus de milieux socioprofessionnels très divers, tous préoccupés par l’insuffisance qualitative de l’environnement hospitalier et médicosocial des personnes atteintes de handicaps cérébraux tels que la maladie d’Alzheimer, les différentes formes d’autisme, d’épilepsies ou de dépression, se mobilise pour contribuer à faire bouger les choses.” Grâce à l’organisation de visites de jardins privés, elle récolte des fonds qui permettent de financer la création de jardins à but thérapeutique et la recherche clinique en France. Et elle organise donc, tous les deux ans, un symposium. Ce 3e symposium avait pour thème « Les jardins à but thérapeutique en milieu hospitalier et médico-social / Pratiques actuelles, recherches et perspectives ». Monique Lemattre en était la présidente.

Je vais faire un résumé rapide des séances de plénière du premier jour et un rapide résumé des tables rondes du deuxième jour. Que les lecteurs de ce blog qui ont assisté au symposium et ont envie d’ajouter leurs impressions n’hésitent pas à s’exprimer dans les commentaires.

  • Biodiversité et santé. Un exposé de Serge Morand, directeur de recherche/Institut des Sciences et de l’Evolution, Université de Montpellier 2 dont on retient que, si la biodiversité est source de pathogènes, elle est aussi une assurance contre les infections. Dans un effort pour équilibrer biophobie et biophilie, comment pouvons-nous apprendre à vivre avec le non-humain et avec les humains qui ne sont pas comme nous ?
  • Des jardins à usage des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. John Zeisel, docteur en sociologie et architecte, dirige Hearthstone Alzheimer Care qui regroupe trois résidences à Boston et trois autres à New York. Pour lui, il ne fait pas de doute que le jardin fournit à ces patients de l’exercice, un contact avec les plantes et surtout des repères dans le temps et dans l’espace. D’où l’importance de créer des jardins qui offrent des repères (il cite les travaux de Kevin Lynch sur l’urbanisme et la neurologie) avec des hauteurs de clôture appropriées par exemple. S’il est possible d’évaluer un jardin, il est difficile de les comparer entre eux à cause de leurs différences. Pour évaluer, il faut trianguler des méthodes d’observations physiques, d’observations des comportements et des entretiens individuels. Notons aussi que John Zeisel enseigne dans le cadre d’un D.I.U commun à Paris 6 et 7 sur les approches non médicamenteuses de la démence. Il laisse son auditoire sur ce message. « Si on veut améliorer la vie de ces personnes, il faut approcher leur condition avec espoir. Si on les regarde avec espoir, il y a moins d’agitation. »
  • Place des jardins dans la thérapeutique institutionnelle et les activités ergothérapeutiques. Gilbert Ferrey est psychiatre des Hôpitaux honoraire à l’hôpital Simone Veil. Il s’interroge sur ce qu’on appelle thérapeutique. Selon lui, le mot fleurit un peu à tort et à travers avec ce sous-entendu que ces méthodes diverses (musique, chant, chien, balnéo,…) sont positives si elles font baisser la consommation de médicaments. Il rappelle aussi que l’enfermement institutionnel des malades a depuis le 19e siècle une volonté de soigner et d’apaiser dans la nature avec des asiles départementaux souvent installés dans des parcs, à l’air pur.
  • Le jardin « Art, mémoire et vie » du Centre Paul Spillmann de l’hôpital Saint-Julien à Nancy

    Le jardin « Art, mémoire et vie » du Centre Paul Spillmann à l’hôpital Saint-Julien de Nancy.

    Principes de conception méthodologique d’un projet de recherche appliquée à l’évaluation des bénéfices des jardins thérapeutiques. C’est Thérèse Rivasseau-Jonveaux, neuropsychiatre au Centre Paul Spillmann de l’hôpital Saint-Julien à Nancy qui présente. Elle raconte la genèse du jardin « Art, mémoire et vie » qui a commencé en 2007 avec une revue bibliographique, une enquête, un bilan des espaces verts par un groupe pilote bientôt élargi pour représenter tous les groupes de personnel. Parmi les bénéfices mesurables en analysant la satisfaction des différents groupes et l’effet sur les symptômes, elle cite aussi l’ouverture de l’hôpital vers l’extérieur grâce à des activités artistiques qui ont lieu dans le jardin. Le docteur Rivasseau-Jonveaux mentionne que le jardin est éclairé jusqu’à 21h00. Les patients qui ne trouvent pas le sommeil peuvent s’y promener avec un accompagnant au lieu de prendre un somnifère.

  • Techniques de thérapie horticole et méthodes d’évaluation pour les personnes souffrant de maladies neuro-dégénératives. Rebecca Haller, directrice de l’institut de formation Horticulture Therapy Institute à Denver, présente les symptômes des maladies de Lou Gehrig, de Huntington et de Parkinson en comparant les problèmes physiques et comportementaux communs à ces maladies. Parmi les difficultés pour ces patients, le travail à hauteur du sol, la fatigue, la motricité, la régularité des mouvements. Mais des adaptations sont toujours possibles : platebandes surélevées, le jardinage assis ou dans des bacs mobiles, des outils adaptés qui demandent moins de force. Elle insiste sur le besoin de préserver l’autonomie des participants qu’il faut accompagner sans faire à leur place. En termes d’évaluation, elle suggère une évaluation avant/après, des notes de séances et différents tests (inventaire de dépression de Beck, inventaire d’anxiété état-trait de Spielberger,…).

    Adaptation et assistance en préservant l'autonomie.

    Adaptation et assistance en préservant l’autonomie.

  • Se former en hortithérapie : et après? Jean-Luc Sudres, professeur de psychologie et de psychopathologie clinique à l’université de Toulouse Le Mirail, a mis un coup de pied dans la fourmilière. Il a posé des questions très pertinentes sur les modalités de la formation à l’hortithérapie, questions qui interrogent aussi sur les objectifs de la pratique. Une formation de quelle durée, massée ou étalée dans le temps, connaissance déclarative uniquement, avec ou sans stage, avec quels contenus, en se formant à toutes les pathologies? Est-ce un certificat ou une accréditation? S’il s’agit d’une nouvelle discipline carrefour et pluridisciplinaire, comme les psychomotriciens, faut-il un ou plusieurs diplômes universitaires? Beaucoup de questions qui ont laissé certains vaguement assommés devant l’ampleur de la tâche. A savoir que Jean-Luc Sudres est à l’origine d’une formation continue en hortithérapie dispensée à l’université de Toulouse Le Mirail.
  • Place des jardins dans la thérapeutique. Gilles Vexlard, paysagiste DPLG et professeur de projet à l’Ecole Nationale Supérieure du Paysage de Versailles, a fait un éloquent plaidoyer plein de bon sens pour le médecin-jardinier et pour « garder intact le plaisir des sens, du contact avec les autres ». A ses yeux, ce n’est pas le terrain qui manque, mais plutôt l’envie et l’état d’esprit. Il déplore « le coût exorbitant du m2 pour les bâtiments comparé au budget minable pour l’extérieur » dans la construction médicale. La conclusion est revenue à Vincent Furnelle, philosophe et professeur à l’Ecole du Paysage à Gembloux en Belgique. Une intervention lyrique impossible à résumer en quelques mots.

Le lendemain, les 170 participants (à la louche) se retrouvaient, non plus à Saint-Anne comme le premier jour, mais au FIAP Jean Monnet, centre de rencontres et d’échanges par excellence imaginé dans l’après-guerre. Les tables rondes de la seconde journée avaient quatre thèmes :

  • Expériences en gérontologie : un jardin dans un EHPAD de Biarritz, le jardin intergénérationnel entre des résidents du service de gérontologie de l’hôpital Louis Mourier et des enfants d’une maternelle voisine à Colombes, une expérience de conception, création et animation d’un jardin à but thérapeutique en PASA (Pôle d’Activités et de Soins Adaptés), les conclusions d’une étude de la Fondation Médéric Alzheimer recensant les jardins aménagés au sein des structures d’hébergement et accueils de jour (l’étude sera bientôt disponible au public et j’y reviendrai plus en détails).
  • Expériences dans d’autres champs d’application : une terrasse verte à l’usage des patients, des familles et du personnel du service de neuro-réhabilitation d’un hôpital de Perugia en Italie, une présentation des ateliers nature culture de Martine Brulé, le film « Natures » du docteur Granier du CHU de Toulouse qui raconte l’ouverture sur le milieu naturel du service d’art-thérapie,…
  • Formation : la formation professionnelle pour les thérapeutes horticoles aux Etats-Unis (je reviendrai plus en détails sur la présentation de Rebecca Haller dans les semaines à venir), l’implantation d’un jardin dans un hôpital de Genève comme outil d’éducation thérapeutique du patient (traitement de l’obésité), un bilan de la formation au CHU de Nancy suite aux demandes des personnels après l’installation du jardin « Art, mémoire et vie », les questionnements d’une équipe en EHPAD sur les besoins en formation à l’heure où un jardin à but thérapeutique est en développement,…
  • Pratiques innovantes/évaluations : la mise en pratique d’une grille d’évaluation sur les jardins à visée thérapeutique au CHU de Nancy, les apports des principes de Lynch (« L’Image de la cité ») appliqués à l’orientation spatiale dans la conception de jardins thérapeutiques dans la maladie d’Alzheimer, éléments pour un programme d’hortithérapie et protocole d’évaluation en soins palliatifs, enfin l’usage de l’agriculture dans le social sur la base de deux études de cas en Belgique et au Japon.

Si vous êtes arrivés jusque là, vous savez à peu près tout de ce qui s’est dit au 3e symposium de Jardins & Santé. Au moins dans les grandes lignes, car il est bien difficile de rendre compte de tous les échanges pendant les tables rondes ou les déjeuners, des petites conversations volées en faisant la queue à la cafétéria ou en partageant un métro à la fin de la journée…J’en ressors avec l’impression que l’hortithérapie est sur la bonne voie, sur les bonnes voies ( ?), même si la question de la formation reste toujours au premier plan des préoccupations. Ca bouge beaucoup plus en France que je ne les soupçonnais avant de remettre les pieds sur le vieux continent. Beaucoup de gens sont actifs et utilisent le jardin pour aider leurs patients à aller mieux. Certes, la discipline a besoin de reconnaissance pour mieux exister et être encore plus utile. Mais tant que des soignants et des soignés pourront se retrouver au jardin et en ressentir les bienfaits quantifiables ou non, tous les espoirs sont permis.