Un nouveau livre vante l’hortithérapie

Livre couverture« La nature est notre mère nourricière et le jardin symbolise le paradis pour l’homme de tout temps », m’explique François Renouf de Boyrie. « Nous avons besoin de reconnecter avec les rythmes de la nature et les bienfaits qu’elle apporte. » C’est pour cela qu’il vient d’écrire un livre intitulé « Le Jardinage, source de bien-être/Se Soigner et s’épanouir par l’hortithérapie » (Editions Piktos). Après avoir fait le tour des jardins dans l’histoire et dans divers pays, il s’attaque aux bienfaits du jardinage. « Posséder un jardin est déjà un privilège : havre de paix, lieu où se ressourcer, oasis de nature, le jardin offre une qualité de vie supplémentaire qui n’a pas de prix. Mais qui dit jardin dit jardinage pour l’entretenir. Or, il se trouve que cette activité étend aussi ses bienfaits sur celui qui la pratique. Soigner le jardin soigne aussi le jardinier », écrit-il en préambule de ce chapitre qui fournira des arguments à tous ceux qui ont besoin de convaincre du bien-fondé du jardinage autour d’eux.

Bienfaits physiques (endurance, souplesse, force, dextérité, qualité du sommeil,…) dont il affirme en citant plusieurs études françaises et étrangères que « le jardinage régulier réduit de moitié les risques de maladies cardiovasculaires, soulage les symptômes de l’arthrose, diminue les risques de dépression, de diabète, d’obésité, d’hypertension et de cancer ». Mais aussi des bienfaits psychiques et psychologiques, sociologiques et économiques. Quand il en arrive à donner des exemples de pratiques d’hortithérapie médicale, l’auteur cite des praticiens qui ne vous sont pas étrangers si vous lisez ce blog régulièrement : Sébastien Guéret de Formavert ou encore Jean-Paul et Anne Ribes dont il raconte en détails et en photos l’expérience à la Maison des Aulnes.

Pourquoi cultiver des plantes plutôt que peindre, dessiner ou faire des maquettes, demande l’auteur. « Tout d’abord, les plantes et les personnes ont en commun le cours de l’existence, elles évoluent et changent, répondent aux soins et au climat, vivent et meurent. Ce trait biologique partagé permet un investissement émotionnel avec la plante », écrit-il. Comme d’autres, il fait cependant le constat que la France a du retard sur les pays anglo-saxons notamment. « Bien que de nombreuses initiatives soient menées avec succès auprès de patients à l’hôpital, d’enfants autistes ou dans les maisons de retraite et les foyers d’accueil médicalisés, (l’hortithérapie médicale) n’est pratiquée que dans quelques hôpitaux, et souvent à titre expérimental. L’hortithérapie sera appliquée sans doute plus largement lorsque cette discipline sera enseignée dans les facultés médicales et sanctionnée par un diplôme d’Etat », constate-t-il. Plus concrètement, il avoue au cours de notre conversation qu’il existe un barrage pharmaceutique au pays du médicament-roi. « Les médecins voient des visiteurs médicaux tout la journée… ». A quand des visiteurs venant leur vanter les mérites de l’hortithérapie ?

L’auteur consacre un chapitre aux médecines douces auxquelles il apparente l’hortithérapie, y compris dans leur manque de reconnaissance officielle et de prise en charge par le système de santé. Il encourage chacun d’entre nous à planter notre jardin et décrit quelques plantes bénéfiques qui mérite d’y trouver leur place. Ce livre, qui n’est pas sans évoquer « Quand jardiner soigne » de Denis Richard (2011), rassemble en un lieu toutes les données actuelles sur l’hortithérapie en France. C’est un précieux outil pour ceux qui veulent se lancer dans un projet et ont besoin d’argumenter leur réflexion.

Agevillage décerne ses 2e prix des « Jardins Thérapeutiques »

Décidemment, les prix pour les jardins thérapeutiques fleurissent ce printemps. Fin mai, Agevillage.com, un magazine web d’information pour les personnes qui vieillissent et leur entourage, a remis ses 2e prix « Jardins Thérapeutiques » au salon de la Santé et de l’Autonomie. « Il y a deux ans, nous avons eu l’intuition que la question des jardins s’implantait dans les projets de maisons d’accueil », explique Annie de Vivie, la fondatrice du site. « Comme le salon Santé et Autonomie montait un espace jardin, nous avons lancé le prix pour valoriser ce qui se passait sur le terrain. La première année, nous avons reçu une vingtaine de candidatures et cette année une centaine. » L’intuition était donc bonne.

Jardinage à la résidence Bastide Médicis à Labège en Haute-Garonne.

Jardinage à la résidence Bastide Médicis à Labège en Haute-Garonne.

Cette année, le Grand Prix est revenu à la résidence Bastide Médicis à Labège en Haute-Garonne.  Je cite directement le dossier de presse. « La résidence Bastide Médicis bénéficie d’un vaste espace vert de trois hectares. Un projet de jardin « à tout âge » a été mis en place par l’équipe soignante en concertation avec les familles de résidents. Ce jardin, qui fonctionne été comme hiver, a été choisi pour la qualité de ses structures ainsi que pour les multiples activités proposées », y explique-t-on. « L’enjeu au jardin est de se régénérer, tout au long de l’année. Nous avons primé cette résidence car ils rendent le jardin accessible 7 jours/7, en été comme en hiver avec des activités à l’intérieur. »

Le "Jardin des 5 sens" de l'association Saint-Joseph à Nay dans les Pyrénées-Atlantiques est ouverts aux résidents, mais aussi à la  population locale.

Le « Jardin des 5 sens » de l’association Saint-Joseph à Nay dans les Pyrénées-Atlantiques est ouverts aux résidents, mais aussi à la population locale.

Chaque fédération partenaire (la Fédération Hospitalière de France, la Fédération des établissements. hospitaliers & d’aide à la personne et l’Union des Centres communaux ou intercommunaux d’action sociale) ont également remis leur prix à une résidence membre du réseau de chacun. Ainsi le prix FHF revient au centre d’accueil de jour « Tian an Heol » situé à Moëlan sur Mer dans le Finistère. « Leur projet « Réveil… du potager », est né d’une spécificité locale : tous les résidents de cette région rurale ont connu et travaillé dans un potager », décrit le communiqué. Le prix FEHAP a été décerné à l’association Saint-Joseph de Nay dans les Pyrénées-Atlantiques où l’équipe a créé un « Jardin des 5 sens » ouvert à tous, résidents et populations locales.

La particularité du jardin de la résidence Camille Saint-Saëns à Epinay-sur- Seine dans la Seine-Saint-Denis est d'être intergénérationnel.

La particularité du jardin de la résidence Camille Saint-Saëns à Epinay-sur- Seine dans la Seine-Saint-Denis est d’être intergénérationnel.

Enfin le prix UNCCAS récompense la résidence Camille Saint-Saëns à Epinay-sur- Seine dans la Seine-Saint-Denis pour son jardin intergénérationnel. Parmi la centaine de candidatures, le jury a souhaité récompenser deux autres jardins avec des prix « Coups de cœur » : l’hôpital psychiatrique Saint-Jean-de-Dieu situé à Leuze-en-Hainaut en Belgique et l’accueil de jour Le Fil d’Argent qui se trouve à La Garde dans le Var. On peut imaginer qu’il fut difficile pour le jury de ne retenir que six jardins parmi tous les candidats.

Annie de Vivie constate une évolution. « Au début, on voulait faire quelque chose de joli pour se balader. Maintenant on y travaille avec les autres, on fait pousser des plantes. On voit des potagers, des espaces pour des animaux, des projets intergénérationnels avec des écoles, des crèches, des assistantes maternelles, les enfants du personnel », décrit-elle. « L’enjeu est d’être dans la vie. » Pour elle, les obstacles sont le manque d’imagination et de vision. « Oui, les professionnels ont besoin d’aide, y compris financière, pour démarrer. Les dotations sont serrées. Mais ils vont chercher des fonds et des aides auprès des mairies, des associations, des écoles d’horticulture ou des ESAT (établissements et services d’aide par le travail).” Elle sent aussi que les professionnels de la santé ont petit à petit accès à plus d’information et de formation dont des dossiers sur le site AgeVillage.

jardin_memoire2013Avec l’association Jardins et Santé, AgeVillage se concentre maintenant sur une nouvelle manifestation qui avait débuté dans quelques régions pilotes l’année dernière, mais se généralise à toute la France en 2013. L’opération « Un jardin pour ma mémoire » aura lieu les 21 et 22 septembre. Ces deux jours, des centaines de résidences ouvriront leurs portes aux visiteurs et feront découvrir leurs jardins. Une occasion unique de pénétrer dans ces endroits souvent mystérieux qui accueillent les personnes âgées.

La double casquette de Jocelyne Escudero

Jocelyne Escudero au jardin

Jocelyne Escudero au jardin

Je répare aujourd’hui une omission qui n’a que trop duré. Voici plusieurs mois que Jocelyne Escudero était sur ma liste de gens à contacter. Nous avons enfin discuté il y a quelques jours et elle m’a raconté le parcours très intéressant qui l’a mené à l’hortithérapie. « A la base, j’ai été exploitante agricole. J’ai fait du maraichage et des fleurs. Mais comme j’étais aussi plasticienne, je me suis formée à l’art thérapie. Puis j’ai obtenu un DU de psychologie médicale générale et j’ai fait une formation lacanienne. » Armée de ces solides bases en psychologie et de ces connaissances horticoles, elle lance dès 1998 à Toulouse un premier jardin d’enseignement à l’environnement adapté à un public handicapé pour tester ses idées sur l’hortithérapie. « A l’époque, l’hortithérapie n’avait pas bon écho. On me reprochait de vouloir faire des jardins ouvriers ou de ne pas être médecin. »

En 2000, elle lance le Jardin de Tara, un nouveau projet où le jardin est un outil de médiation comme peuvent l’être l’art ou la musique. Le Jardin de Tara est aussi une plateforme de développement durable où elle forme à partir de 2002 des personnels qui ont une pratique dans leurs établissements. « Au départ, des animateurs et des éducateurs pratiquaient dans leur établissement, mais ce n’était pas évalué et c’était plus orienté vers la formation professionnelle, en CAT par exemple », constate Jocelyne. « On mélange toujours jardin thérapeutique et hortithérapie. Dans l’art thérapie, il ne s’agit pas de visiter des musées ou des expos. L’objectif est bien la pratique et l’art est un outil de médiation dont on se saisit. Avec l’hortithérapie, il s’agit aussi de pratique du jardinage en vue d’une thérapie. Pour moi, il faut avoir les deux casquettes : une formation en horticulture et une formation en sciences humaines. »

Un groupe au jardin

Un groupe au jardin

Après 7 ans, elle doit se résigner à fermer le Jardin de Tara qui accueillait des enfants en rééducation, des personnes âgées en maisons de retraite ou encore des polyhandicapés. C’est une question de rentabilité difficile à atteindre. Aujourd’hui Jocelyne propose toujours des formations à travers l’association Trace et Couleurs. La prochaine aura lieu dans quelques jours à Figeac dans le Lot et s’adresse aux animateurs, éducateurs, psychologues, psychothérapeutes, travailleurs sociaux pour les sensibiliser à l’hortithérapie sur une période de quatre jours, avec une seconde session d’approfondissement. Depuis 2006 et jusqu’à peu, elle intervenait également dans un programme de formation continue initié à l’université de Toulouse par Jean-Luc Sudres. Elle enseigne aussi à travers les Jardiniers de France, dans un but qui n’est pas thérapeutique, mais touche à l’environnement, à la culture biodynamique ou encore la permaculture.

Education sensorielle

Education sensorielle

Cela fait 15 ans que Jocelyne Escudero croit à l’hortithérapie et elle constate des évolutions, mais pas la reconnaissance espérée. « C’est une vague et tout le monde veut s’en saisir. On voit des gens qui mettent des formations sur Internet et qui n’ont aucun cursus en horticulture ou en psychologie », constate Jocelyne. « Je souhaiterais un véritable diplôme, sinon on ne sera pas pris au sérieux. En France, l’art thérapie n’est pas un diplôme d’état contrairement aux Etats-Unis, en Angleterre ou au Québec. » Elle fait remarquer que l’histoire entre le jardin et l’hôpital est lourde en France. « Les asiles étaient des fermes qui devaient vivre en autonomie. Il y avait des patients qui mourraient de faim dans ces asiles. » Elle déplore également qu’il n’y ait pas plus de partenariats avec les professionnels de l’horticulture. « Il faudrait qu’il y ait dans les lycées horticoles et agricoles une branche sur le jardin thérapeutique. Ils apprendraient à faire un cahier des charges pour un jardin thérapeutique. Je n’en connais pas. ». Il reste beaucoup à faire…

Prix de la Fondation Truffaut : trois premiers jardins récompensés

Sous l’imposante verrière du Grand Palais transformé en immense jardin à l’occasion de l’événement L’Art du jardin, trois jardins ont été distingués, chacun dans leur catégorie : pédagogique, insertion et thérapeutique. C’est la première fois que la toute jeune Fondation Truffaut organise ces prix, en grande partie pour attirer l’attention sur son action et amener plus de jardins à solliciter son aide. On espère que son appel sera entendu. Je rappelle que la Fondation m’avait gentiment demandé de faire partie du jury. J’étais donc aussi de la fête pour la remise des prix le jeudi 31 mai et mise à contribution pour remettre l’un d’eux. Dehors, il pleuvait à verse. A l’intérieur, l’ambiance était chaleureuse, presque tropicale.

L'association Talégalle reçoit son prix, entourée de Patrick Mioulane, Bruno Lanthier, Carole Renucci et Daniel Joseph.

L’association Talégalle reçoit son prix, entourée de Patrick Mioulane, Bruno Lanthier, Carole Renucci et Daniel Joseph.

Dans la catégorie pédagogique, « Le Grand Jardin » de l’école maternelle de Saint-Quentin-la-Poterie est récompensé pour son action auprès des jeunes enfants. Animé par l’association Talégalle, ce jardin se compose de 12 jardins carrés, d’une parcelle de blé de 50 m2 et de cultures sur buttes (pommes de terre, haricots,…). Il donne l’occasion aux enfants d’apprendre les gestes du jardinier : semer, planter, arroser. Récemment, les élèves ont aussi organisé une exposition de photos prises au jardin. Si vous êtes des fidèles de ce blog, vous connaissez déjà l’association Talégalle que je vous avais présentée en décembre dernier. Félicitations à Matthieu, Caroline et les autres.

Bruno et Elizabeth de la Maison des Aulnes, deux des jardiniers du jardin d'Epi Cure, reçoivent le prix avec Stéphane Lanel, Jean-Paul et Anne Ribes.

Bruno et Elizabeth de la Maison des Aulnes, deux des jardiniers du jardin d’Epi Cure, reçoivent le prix avec Stéphane Lanel, Jean-Paul et Anne Ribes.

Dans la catégorie thérapeutique, le lauréat vous est aussi connu. C’est le jardin d’Epi Cure de la Maison des Aulnes, un jardin que j’ai eu la chance de visiter l’hiver dernier. Elisabeth et Bruno représentaient les résidents des Aulnes à côté de Stéphane, Anne et Jean-Paul. Une belle aventure racontée dans une vidéo filmée sur place et racontée également dans l’émission Pixel du 31 mai consacrée à l’hortithérapie. Plus que jamais, ce projet démontre comment des participants convaincus et des animateurs passionnés peuvent faire des miracles dans le jardin. Un grand bravo et bonne continuation.

Des élèves qui participent au Jardin Extraordinaire de Saintex sont venus recevoir le prix récompensant leur jardin avec leurs professeurs.

Des élèves qui participent au Jardin Extraordinaire de Saintex sont venus recevoir le prix récompensant leur jardin avec leurs professeurs.

Enfin, dans la catégorie insertion, c’est la Segpa du collège Antoine de Saint-Exupéry d’Ermont dans le Val-d’Oise qui remporte le prix. Une Segpa, c’est une section d’enseignement général et professionnel adapté, des classes qui accueillent des jeunes en grande difficulté scolaire. L’objectif est de leur redonner confiance en eux et le goût d’apprendre. Le jardin a semblé un bon moyen d’y arriver. Quelques professeurs, un employé de Truffaut, une aide financière et voilà le projet qui sort de terre plus vite que prévu. Pour boucler la boucle, les jeunes cuisinent leur récolte pour leurs profs. A la fin juin, j’ai l’intention d’aller visiter le Jardin extraordinaire de Saintex lors d’une soirée porte ouverte. A bientôt au Jardin extraordinaire…