« Jardiner aide les schizophrènes à être dans le moment »

Suzanne Redell dans un oasis de verdure avec une patiente du Cordilleras Mental Health Center.

Suzanne Redell est une rescapée de la Silicon Valley qui a trouvé le bonheur dans le jardin. Après avoir travaillé chez Apple et dans d’autres sociétés high-tech, elle cherchait un environnement plus serein, moins sous pression. « J’avais vécu en Angleterre où j’avais vu les programmes impressionnants de Thrive, en particulier avec des adultes atteints de troubles du développement. Je n’avais aucun contact avec la nature dans mon travail et je voulais changer. Mon mari jardinait et le jardinage m’aidait à me poser. Après un diplôme en horticulture, j’ai appris qu’une école à Oakland, Merrit College, offrait une formation en thérapie horticole. » Suzanne possède également une maitrise en psychologie.

Sa première expérience sera auprès de jeunes adultes avec un double diagnostique d’addictions et de maladies mentales. Puis elle apprend l’existence d’un programme qui se lance plus près de chez elle, un programme s’adressant à des adultes handicapés cette fois. Elle se propose comme bénévole. De ce programme auquel elle aura participé pendant 7 ans, elle garde un souvenir ému. Un jeune homme atteint de paralysie cérébrale et participant à son programme annonce fièrement à sa mère : « J’ai un travail maintenant. » Son programme lui survit grâce à un cahier où elle consigne toutes ses activités pour que quelqu’un puisse continuer. Prochaine étape, un centre de jour pour personnes âgées, « un groupe de gens très intellectuels, souvent de l’université de Stanford, habitués à un jardin et vivant dorénavant en immeuble. »

Suzanne travaille individuellement avec certains résidents dans le cadre de leur formation professionnelle.

Depuis 5 ans, Suzanne est la thérapeute horticole au Cordilleras Mental Health Center dans la ville de Redwood City au sud de San Francisco. Cet établissement accueille 130 résidents atteints de troubles mentaux qui sont soit assignés sans possibilité de sortie (locked up), soit plus indépendants et ouverts vers l’extérieur. Elle intervient trois jours par semaine auprès de ces deux groupes. C’est une assistante sociale qui poursuivait des études de nutrition qui s’est dit que faire attention à la nourriture et proposer de l’exercice, comme le jardinage, seraient deux changements bénéfiques pour les résidents.

Suzanne et une patiente

Aussitôt un terrain de 8 000 m2 derrière la résidence est mis à disposition du programme et Suzanne est embauchée comme consultante. « C’est dans une zone préservée en pleine nature. On voit souvent des faucons. Je suis tombée amoureuse de cet endroit », explique Suzanne. « Quand cette assistante sociale est partie, j’ai eu peur pour le programme. Mais en fait il n’a fait que grandir et une des dirigeantes du centre est en train de suivre une formation en hortithérapie ! » Une serre vient d’être construite et le programme travaille maintenant individuellement avec des résidents qui reçoivent une formation professionnelle (vocational training).

Parmi les défis que présente cette population, Suzanne cite le caractère imprévisible des résidents. « Parfois leur maladie les met dans l’incapacité de venir à l’activité. Mais c’est un tel plaisir de les voir développer leur potentiel comme ce jeune homme de 25 ans à qui nous avons donné une zone dont il est responsable. Son défi a été de le nettoyer et de concevoir les plantations en demandant leur avis aux autres résidents. »

Un résident pendant l’arrosage

« Ils ont des hauts et des bas. Parfois le groupe commence mal. Récemment, une personne qui est schizophrène est partie en colère car on avait dérangé la routine. J’ai cru que tout allait mal se passer, mais une autre participante a fait un travail merveilleux, elle a désherbé une zone et planté des dahlias. On ne peut pas pousser les participants à faire quelque chose. Il faut arriver avec une attitude ouverte. » Le groupe de jardiniers va bientôt assumer la responsabilité d’entretenir les terrains autour du centre, un travail qui était jusque là confié à une équipe du comté. « Cela leur donne un sentiment de fierté. »

« Jardiner n’enlève pas la maladie mentale, mais cela améliore leur qualité de vie. Je peux attester que jardiner aide les schizophrènes à être dans le moment », conclut Suzanne qui se dit combler spirituellement par ce travail et reconnaissante « à un niveau viscéral ». Son programme a reçu plusieurs récompenses dont le Tony Hoffman Community Mental Health Services Award. « A la cérémonie, des résidents sont venus parler de ce que le jardin représente pour eux. »

La récolte est utilisée en cuisine dans le respect des objectifs de départ : une meilleure nutrition et de l’exercice.

Une communauté se construit autour d’un jardin

Pendant deux semaines, le blog fonctionne à rythme ralenti, un article par semaine, pendant que nous profitons de la douceur de vie poitevine.

Dans la petite ville de Lafayette en Californie, un groupe s’est battu pour son jardin communautaire et, depuis quelques mois, leur rêve prend forme. Au départ, un comité de l’association Sustainable Lafayette voulait sensibiliser la population sur les questions de provenance de la nourriture. La même association avait déjà lancé un marché de producteurs (farmer’s market) dans la ville. Cinquante familles sont devenues membres du nouveau jardin. Contre 200 dollars et deux heures de travail hebdomadaires, ces familles reçoivent une partie de la récolte. Le jardin, qui est géré par une jardinière rémunérée, est ouvert à tout le monde trois jours par semaine. On peut y suivre des ateliers sur les plantes indigènes comestibles ou les insectes, par exemple. « Nous nous sommes installés sur un ancien parking qui appartient à la société qui fournit l’eau à la région. Nous louons le terrain pour 2 000 dollars par an », explique Janet Thomas, une ancienne enseignante qui fait partie de l’équipe et dirige les curieux vers l’association The Urban Farmers.

Accueil au Lafayette Community Garden

Au centre du jardin, un endroit pour se rencontrer et parler.

Des platebandes ont été créées avec des toiles de jute remplies de paille.

Table aux herbes

Un tableau permet de transmettre les instructions aux membres du jardin.

En milieu psychiatrique, des jeunes trouvent la paix dans le jardin

Mardie Hay dans le jardin du Cincinnati Children’s Hospital Medical Center (©Andrew Ward Photography)

Les jeunes qui séjournent dans le programme psychiatrique résidentiel du centre médical de l’Hôpital pour Enfants de Cincinnati (Cincinnati Children’s Hospital Medical Center) sont des enfants et des ados de 8 à 18 ans qui souffrent de problèmes psychiatriques aigus ou chroniques. Ils sont là entre trois et six mois pendant que l’équipe ajuste leur traitement et les aide à acquérir des compétences qui les aideront à leur sortie. Pendant leur séjour et par choix personnel, ils peuvent se joindre aux activités proposées dans le jardin par Mardie Hay.

 

L’anecdote de l’ananas a renforcé l’estime de soi des participants.

Imaginez ces jeunes installés dans le jardin, les yeux fermés, écoutant simplement leurs sens. « J’avais une impression de paix », expliquent-ils souvent. Dans cet univers sécurisé à l’intérieur de l’hôpital, ils ont l’impression de faire une pause. « Mon job est qu’ils réussissent. Je choisis des plantes faciles à bouturer et à propager », explique l’hortithérapeute. Elle aime raconter une anecdote qui en dit long. « Une fois, des enfants ont demandé si on pouvait planter des hauts d’ananas qui étaient sur la pile de composte. C’est ce que nous avons fait et, 18 mois plus tard, ils ont commencé à fleurir. Nous les avons récoltés. Le message pour eux est que rien n’est sans valeur. Beaucoup d’entre eux se sentent abandonnés à cause des circonstances dans leur vie et participer au programme de jardinage est une façon de construire leur estime de soi. »

Mardie Hay et deux patientes en pleine plantation.

En collaboration avec le récréothérapeute, Mardie contribue au projet de traitement de chaque résident. « Deux objectifs fréquents sont des interactions positives avec leurs pairs et l’apprentissage d’une activité de loisirs qui leur permettra de ne pas s’attirer d’ennuis plus tard. » Le reste de l’équipe est composée, selon les cas, d’un psychiatre ou psychologue, d’un assistant social, d’un spécialiste de la santé mentale, d’un orthophoniste et d’enseignants. L’équipe se réunit toutes les semaines pour discuter des patients et de leur prise en charge.

Un jeune patient travaille dans la serre.

Mardie règne sur un univers d’environ 4000 m2 qui comprend un jardin et une serre. Une nouvelle serre verra bientôt le jour. « J’ai entendu parler du projet et je me suis proposée parce que j’avais des compétences. J’ai ensuite suivi les cours du Horticultural Therapy Institute pour devenir certifiée en hortithérapie. La prochaine étape est de devenir une « registered horticultural therapist », mais pour cela je dois trouver un mentor. »

Un des challenges dans cet environnement est la sécurité. « La moitié de nos patients a essayé de se faire mal. Les objets tranchants sont dangereux, mais nous utilisons quand même de vrais outils. J’utilise uniquement des produits bios qui sont sous clé. Le psychiatrique était très appréhensif au début. Mais après quatre ans, nous n’avons eu aucun incident violent », rapporte Mardie.

Les jeunes patients expriment leur créativité.

L’autre difficulté est de donner des instructions compréhensibles par un groupe aux besoins divers. « Il y a quelques problèmes de déficience mentale légère, des handicaps de perception soit réceptive, soit expressive. Il y aussi des problèmes de déficit d’attention », énumère Mardie. «  J’utilise des cartes laminées avec des indications visuelles. Je fais beaucoup d’instruction individualisée et je fais une démonstration visuelle. » De plus, elle limite le groupe à six participants.

« Ce sont eux qui décident de venir. Mais une fois qu’ils se sont engagés, ils doivent continuer à venir pour apprendre la responsabilité. Après quelques séances, ils reçoivent leur propre plante. Ils peuvent avoir jusqu’à trois plantes qu’ils ramènent chez eux ou partagent avec le staff. Certains n’ont jamais rien possédé. L’idée est de créer une expérience du succès et de leur donner un loisir positif. »

Le jardin déborde d’énergie.

Le plaisir de la récolte

Une thérapeute horticole et une armée de bénévoles

Anne McMinn pendant une des ventes de plantes qui aident à financer son programme.

Au Napa Valley Hospice Adult Day Services (NVHADS), Anne McMinn a de la chance. Une armée de bénévoles l’aident à encadrer les participants, des personnes âgées souvent frêles ou dans les stades précoces de la maladie d’Alzheimer, mais aussi des personnes plus jeunes ayant souffert un traumatisme crânien ou atteintes d’une lésion de la moelle épinière. Le centre dispose aussi d’une équipe complète de kinés, ergothérapeutes, orthophonistes et travailleurs sociaux.

Les participants fréquentent en principe le service cinq jours par semaine de 10h00 à 15h00. Ils ont un choix d’activités comme des discussions sur l’actualité ou un programme intitulé « voyage en fauteuil » au cours duquel ils regardent une vidéo sur une destination et en discutent ensuite.  Et bien sûr la thérapie horticole. « J’aime le fait que les participants ont la dignité du choix », affirme Anne. Son programme compte entre 20 et 25 participants réguliers. « On voit qui est là et on les invite à venir. On apprend à bien connaître les gens. » Peu de temps après avoir lancé le programme en 2005 à son arrivé à Napa (la région vinicole principale de la Californie), Anne a constaté que des bénévoles avaient envie de participer.

« J’ai maintenant 9 bénévoles. Pour chaque séance, j’ai 3 ou 4 bénévoles et 4 ou 5 participants. On peut ainsi travailler individuellement avec chacun pour que les participants en retirent un maximum. Un facteur important est la sécurité. On doit se tenir prêt à intervenir sans faire l’activité à la place de la personne. Pour les personnes qui souffrent de démence, elles pourraient regarder dans le vide pendant toute la séance si on n’engageait pas leur attention individuellement. »

La plupart des bénévoles ne sont pas formés à la thérapie horticole, à part une nouvelle recrue. Mais tous sont des jardiniers accomplis. « Il faut avoir de la patience, de l’humour et être capable d’adapter l’activité à la personne et à son rythme. Il y a une composante importante de formation. Tous les deux mois, nous déjeunons ensemble et c’est une autre occasion de faire des mini formations. »

Les participants peuvent travailler debout ou assis.

« Nous plantons, nous taillons, nous mettons de l’engrais, nous récoltons dans nos platebandes surélevées et des barriques coupées en deux. J’essaie d’avoir une variété de légumes, d’herbes et de fleurs comme dans un jardin personnel pour que chacun y trouve quelque chose. Si nous sommes à l’intérieur, nous faisons de la propagation, nous semons, nous faisons des pots-pourris, des fleurs séchées, un bingo avec des plantes. Trouver de nouvelles idées est toujours un défi », décrit Anne. En plus de ses bénévoles, Anne compte sur la générosité d’une association caritative locale, un club de femmes dédié à l’art et au jardin, pour financer son programme. Comme beaucoup d’autres thérapeutes, elle génère aussi quelques centaines de dollars avec des ventes de plantes.

Anne a accès au projet thérapeutique des participants et peut s’assurer que ses activités complètent les objectifs fixés par les autres thérapeutes. « Les bénéfices principaux pour les participants sont de sortir respirer et d’être au grand air et au soleil. Pour les patients atteints d’Alzheimer, une activité comme couper les fleurs fanées peut ramener des souvenirs. » La thérapie horticole est une des activités qui permet d’entretenir l’état général des patients,  « de les garder fonctionnels aussi longtemps et à un niveau aussi élevé que possible ».

Un patient qui est schizophrénique et souffre d’hallucinations auditives aime venir jardiner car l’activité l’aide à rester connecté avec la réalité et à se concentrer. Un autre qui manque de confiance en lui a constamment besoin d’encouragements. « Travailler dans le jardin engage les sens, ça fait du bien », conclut Anne.

Expérience personnelle : cancer et jardin

La vie est parfois pleine d’ironie. Alors que j’aurais dû suivre mon dernier cours de thérapie horticole avec le Horticultural Therapy Institute en Californie, j’étais de retour en France pour me faire opérer d’un cancer du sein. D’étudiante, je suis passée sans transition à participante ! De la théorie à la pratique, sans crier gare. Non, je n’ai pas rejoint un groupe organisé. Cette thérapie dans le jardin était à échelle individuelle. Ce fut d’abord désherber et préparer le jardin pour l’hiver avec mes parents qui m’ont recueillie pendant ma visite médicale en deux étapes, opération puis traitement. Entre les deux, j’ai pu rentrer en Californie pour passer un peu de temps avec mes enfants et mon mari. Un jour, nous avons tous les deux choisi et planté des jonquilles. C’était en octobre et je devais bientôt repartir pour entreprendre une radiothérapie de six semaines. Mais je savais que ces bulbes dormaient au chaud dans la terre californienne et n’attendaient que le printemps pour pousser et laisser éclater leurs couleurs. Je savais aussi que je serais de retour pour les voir. Cette pensée était réconfortante.

Mon jardin « thérapeutique » à Berkeley.

A mon retour en Californie, le jardin de notre maison, échangée pour un an contre notre appartement parisien, avait un peu souffert de manque d’attention. Il y avait beaucoup de choses à aimer dans cette belle maison dans les collines de Berkeley, y compris une magnifique vue de la baie de San Francisco et de magnifiques couchers de soleil extrêmement bénéfiques pour le moral. Mais le jardin était clairement un de ses atouts principaux. Toutes les semaines, j’ai passé du temps, seule le plus souvent, à désherber. Et à Berkeley, tout pousse et les mauvaises herbes avec. J’ai savouré ces moments de calme qui me permettaient à la fois de m’aérer et de me concentrer sur une tâche qui m’apparaissait symbolique. Ces mauvaises herbes que j’arrachais avec jubilation étaient comme les cellules cancéreuses que la chirurgie, puis la radiothérapie avaient éradiquées.

Si on veut pousser la comparaison jusqu’au bout, on pourrait désespérer. En effet, on ne vient jamais à bout des mauvaises herbes. Jusqu’au jour où nous avons quitté la maison à la fin juillet, la lutte a continué. Mais c’est sans doute un peu pareil avec le cancer. Il est là, il pourrait revenir. Il faut vivre avec cette idée tout en restant dans l’action et l’optimisme. Et pourtant avoir entretenu le jardin, avoir donné la chance à de belles plantes de s’épanouir a eu pour moi un effet bénéfique, thérapeutique même Pour moi, pas de groupe de paroles, mais une bêche, des ciseaux, une paire de gants et un jardin qui avait besoin de moi. Je regrettais un peu mon petit jardin potager des deux années précédentes, mais ce jardin d’ornement était une bonne prescription tout compte fait.  A mon retour, nous avons également fait des pots de confitures avec les citrons du jardin et les feijoa du voisin. Pendant le reste de l’année, nous avons distribué ces petits pots en cadeaux un peu partout sur notre passage.

Avec Marge (à gauche) au centre de jour pour personnes âgées.

Le jardinage était présent par un autre biais dans ma vie depuis mon retour en Californie. Il y a 7 mois, j’ai commencé à faire du bénévolat dans un programme d’hortithérapie dans un centre de jour pour personnes âgées. Toutes les semaines, je rencontrais ces femmes et ces hommes et nous travaillions ensemble, à planter, à semer, à désherber, à fabriquer des sachets de thé à la menthe ou à sécher des fleurs pour en décorer des cartes,…La semaine dernière, j’ai dit au revoir à tout le monde puisque le retour en France approche. Dans la petite fête improvisée le jour de mon départ, j’ai compris combien j’avais reçu autant que donné à la fois des participants et de Marge, la thérapeute qui m’a pris sous son aile.

Comme ils vont me manquer tous les deux, mes jardins californiens, dans la jungle urbaine de Paris. Et comme ils vont me manquer Ida, Isabel, Candee, Liev et les autres. Il faudra que je trouve vite une opportunité pour remettre les mains dans la terre…J’ai un peu hésité à raconter cette histoire personnelle, mais j’ai été inspirée par l’exemple de Clare Cooper Marcus, grande experte américaine des jardins thérapeutiques qui ne se prive pas de raconter comment un des jardins qu’elle avait conçu l’a aidée quand elle y est revenue en patiente suivant une chimio. L’arroseur arrosé et l’aidant aidé. Finalement, la vie est bien faite.

Désintoxication : la méthode verte

Gene Jones et la récolte d’haricots.

Gene Jones travaille pour Recovery Ventures Corporation, une association à but non lucratif qui aide les toxicomanes et les alcooliques à prendre un nouveau départ dans la petite ville de Black Mountain en Caroline du Nord. « Parmi les 96 clients, hommes et femmes, nous avons ceux qui sont placés par le tribunal, ceux qui viennent d’eux-mêmes et ceux qui sont envoyés par leur famille », explique Gene. Avec un taux de réussite de 67% qui est renforcé par un suivi après la sortie du programme, le centre est fier de ses résultats. Et depuis mars 2011, de la contribution de la thérapie horticole dans le succès de ses clients.

Une nouvelle serre en construction.

Pour l’instant, Gene n’a pas la capacité d’accueillir tout le monde dans son programme de thérapie horticole qui est mis en avant sur le site du centre. A sa disposition, deux serres, un terrain de 60 000 mètres carrés, un poulailler d’une centaine de poules. « En plus d’être thérapeutique, le programme a un aspect professionnel car ils se forment à un emploi potentiel à la sortie » explique Gene. La particularité du programme est d’être un programme résidentiel de 24 mois. Tous les résidents doivent travailler au jardin, au service de traiteur ou dans d’autres activités proposées. Ce travail sous forme de contrat avec des entités extérieures est rémunéré. Au début, l’argent est réutilisé dans le programme. Mais au bout de 18 mois, les résidents commencent à garder leur argent.

« J’ai 5 ou 6 personnes qui m’aident régulièrement. C’est leur travail 8 heures par jour. J’aime le fait qu’ils puissent suivre des tâches du début à la fin. D’autres viennent passer quelques heures. Il faut qu’ils soient responsables dans leur engagement sinon il y a des conséquences comme la perte de certains privilèges. » Le jardin sert aussi de soupape de sécurité à certains résidents qui passent une mauvaise journée. « Je les amène dans la serre pendant quelques heures, ils travaillent avec leurs mains. » Et le stress diminue.

Deux clientes de Recovery Ventures au travail.

Le programme de Gene est en pleine expansion et son équipe de résidents va passer à une dizaine de personnes. Une serre hydroponique toute neuve va permettre au centre de cultiver et de commercialiser des salades toute l’année. Déjà, la récolte de la ferme est vendue sur place et sur des marchés locaux, le reste étant utilisé pour nourrir les résidents. «Nous avons un contrat avec le Biltmore (une attraction locale qui faut le coup d’œil, NDRL) pour leur vendre nos salades et nous leur offrons déjà un service de traiteur. Avec la serre hydroponique, nous cultiverons 6 200 têtes de salade tous les 10-12 jours. C’est important de pouvoir générer des revenus car nous ne recevons pas d’argent public. »

En quoi jardiner aident-ils ces résidents à vaincre leurs addictions ? « Ils peuvent échapper au stress de leur vie quotidienne. Si vous jardinez, vous comprenez que l’activité permet de se concentrer sur la tâche du moment. Ce n’est pas banal comme faire la vaisselle. Ils plantent, ils voient leurs plantes grandir et ils récoltent », résume Gene. Beaucoup ont des problèmes mentaux sous-jacents et utilisent la drogue ou l’alcool comme une auto-médication. Gene insiste que les résidents du centre viennent de tous horizons. « Nous avons des docteurs, des avocats, des plombiers, des enseignants. »

Quand les clients quittent le programme, ils peuvent se tourner vers les cinq maisons «transitionnelles» gérées par Recovery Ventures à condition d’avoir un emploi. En plus d’un logement sûr et libre de tentations, ils continuent à recevoir un suivi qui augmente leur chance de rester « clean and sober ».

Gene Jones tient un poussin. La ferme compte une centaine de poules.

Auparavant, Gene qui s’est formé à la thérapie horticole à la fois au Horticultural Therapy Institute et à Providence Farm au Canada en 2004, gérait des maisons pour jeunes en difficulté et leur proposait des activités de jardinage, « une bonne façon d’apprendre à gérer son temps, son argent et une bonne compétence pour un travail. » Une des différences est que les jeunes étaient souvent résistants à cette activité tandis que les résidents de ce programme de désintoxication sont 100% partants. « Mon seul problème est de ne pas pouvoir accueillir plus de gens. »

« Un jeune homme avait envie de quitter le programme. Il était de la ville et n’avait jamais eu de contact avec les plantes à part le cannabis. Il m’a dit récemment que, sans moi, il serait parti. Dans un mois, il va devenir mon premier employé. Il a maintenant des compétences à offrir, ici ou ailleurs », rapporte Gene avec fierté. « C’est mon but. »

Le jardin bio de Michelle Obama à la Maison Blanche

Le potager de la Maison Blanche

Depuis leur arrivée à la Maison Blanche, les Obama cultivent un potager bio d’environ 100 m2 sur la pelouse sud de la résidence. Les légumes et les fruits de ce jardin servent à nourrir la première famille et leurs invités. C’est surtout la femme du président qui a pris l’initiative de ce jardin qui cadre bien avec sa campagne contre l’obésité. Elle reprend ainsi une tradition de jardins présidentiels dont le dernier exemple en date était celui d’Eleanor Roosevelt qui avait planté un « victory garden » pendant la Seconde guerre mondiale.

American Grown, le livre de Michelle Obama

En mai dernier, Michelle Obama a publié un livre intitulé American Grown : The Story of the White House Kitchen Garden and Gardens Across America où elle raconte l’histoire de son jardin et d’autres jardins américains tout en partageant quelques recettes. Elle est convaincue qu’avoir accès à une nourriture saine et abordable permettra au pays de renouer avec une nutrition plus propice à une bonne santé. Elle aimerait voir plus d’Américains cultiver leur potager. La First Lady a annoncé que les revenus de son livre seraient reversés à la National Parks Foundation pour faire la promotion du jardinage, du bien manger et de l’activité à l’extérieur.

En plus de son intérêt pour le jardinage, elle est aussi à l’origine d’une campagne en faveur de l’exercice, Let’s Move, dans un pays où un enfant sur trois est en surpoids ou obèse et où 23,5 millions sur 314 millions d’habitants vivent dans un « food desert » sans accès à une nourriture saine. Comme souvent dans ce pays ultra-libéral, certains ne sont pas contents des efforts de la First Lady. Monsanto, le conglomérat de la biotech végétale amateur d’OGM, se plaint que son jardin bio fait, par ricochet, une mauvaise publicité à l’agriculture conventionnelle. D’autres sont choqués que le gouvernement ose dicter leur conduite aux citoyens.

Je dis bravo, Michelle !

Michelle Obama, les mains dans la terre