Désintoxication : la méthode verte

Gene Jones et la récolte d’haricots.

Gene Jones travaille pour Recovery Ventures Corporation, une association à but non lucratif qui aide les toxicomanes et les alcooliques à prendre un nouveau départ dans la petite ville de Black Mountain en Caroline du Nord. « Parmi les 96 clients, hommes et femmes, nous avons ceux qui sont placés par le tribunal, ceux qui viennent d’eux-mêmes et ceux qui sont envoyés par leur famille », explique Gene. Avec un taux de réussite de 67% qui est renforcé par un suivi après la sortie du programme, le centre est fier de ses résultats. Et depuis mars 2011, de la contribution de la thérapie horticole dans le succès de ses clients.

Une nouvelle serre en construction.

Pour l’instant, Gene n’a pas la capacité d’accueillir tout le monde dans son programme de thérapie horticole qui est mis en avant sur le site du centre. A sa disposition, deux serres, un terrain de 60 000 mètres carrés, un poulailler d’une centaine de poules. « En plus d’être thérapeutique, le programme a un aspect professionnel car ils se forment à un emploi potentiel à la sortie » explique Gene. La particularité du programme est d’être un programme résidentiel de 24 mois. Tous les résidents doivent travailler au jardin, au service de traiteur ou dans d’autres activités proposées. Ce travail sous forme de contrat avec des entités extérieures est rémunéré. Au début, l’argent est réutilisé dans le programme. Mais au bout de 18 mois, les résidents commencent à garder leur argent.

« J’ai 5 ou 6 personnes qui m’aident régulièrement. C’est leur travail 8 heures par jour. J’aime le fait qu’ils puissent suivre des tâches du début à la fin. D’autres viennent passer quelques heures. Il faut qu’ils soient responsables dans leur engagement sinon il y a des conséquences comme la perte de certains privilèges. » Le jardin sert aussi de soupape de sécurité à certains résidents qui passent une mauvaise journée. « Je les amène dans la serre pendant quelques heures, ils travaillent avec leurs mains. » Et le stress diminue.

Deux clientes de Recovery Ventures au travail.

Le programme de Gene est en pleine expansion et son équipe de résidents va passer à une dizaine de personnes. Une serre hydroponique toute neuve va permettre au centre de cultiver et de commercialiser des salades toute l’année. Déjà, la récolte de la ferme est vendue sur place et sur des marchés locaux, le reste étant utilisé pour nourrir les résidents. «Nous avons un contrat avec le Biltmore (une attraction locale qui faut le coup d’œil, NDRL) pour leur vendre nos salades et nous leur offrons déjà un service de traiteur. Avec la serre hydroponique, nous cultiverons 6 200 têtes de salade tous les 10-12 jours. C’est important de pouvoir générer des revenus car nous ne recevons pas d’argent public. »

En quoi jardiner aident-ils ces résidents à vaincre leurs addictions ? « Ils peuvent échapper au stress de leur vie quotidienne. Si vous jardinez, vous comprenez que l’activité permet de se concentrer sur la tâche du moment. Ce n’est pas banal comme faire la vaisselle. Ils plantent, ils voient leurs plantes grandir et ils récoltent », résume Gene. Beaucoup ont des problèmes mentaux sous-jacents et utilisent la drogue ou l’alcool comme une auto-médication. Gene insiste que les résidents du centre viennent de tous horizons. « Nous avons des docteurs, des avocats, des plombiers, des enseignants. »

Quand les clients quittent le programme, ils peuvent se tourner vers les cinq maisons «transitionnelles» gérées par Recovery Ventures à condition d’avoir un emploi. En plus d’un logement sûr et libre de tentations, ils continuent à recevoir un suivi qui augmente leur chance de rester « clean and sober ».

Gene Jones tient un poussin. La ferme compte une centaine de poules.

Auparavant, Gene qui s’est formé à la thérapie horticole à la fois au Horticultural Therapy Institute et à Providence Farm au Canada en 2004, gérait des maisons pour jeunes en difficulté et leur proposait des activités de jardinage, « une bonne façon d’apprendre à gérer son temps, son argent et une bonne compétence pour un travail. » Une des différences est que les jeunes étaient souvent résistants à cette activité tandis que les résidents de ce programme de désintoxication sont 100% partants. « Mon seul problème est de ne pas pouvoir accueillir plus de gens. »

« Un jeune homme avait envie de quitter le programme. Il était de la ville et n’avait jamais eu de contact avec les plantes à part le cannabis. Il m’a dit récemment que, sans moi, il serait parti. Dans un mois, il va devenir mon premier employé. Il a maintenant des compétences à offrir, ici ou ailleurs », rapporte Gene avec fierté. « C’est mon but. »