Conférence AHTA 2014 : Martine Brulé raconte

On ne présente plus Martine Brulé. Au sein de Viv’Harmonie, elle pratique l’hortithérapie depuis plus de 10 ans. Membre de longue date de l’AHTA (American Horticultural Therpay Association), elle s’est rendue à la conférence annuelle et nous fait le plaisir de partager son expérience. Pour une courte description de chaque présentation, je vous renvoie également sur le site de l’AHTA. Merci beaucoup à MartineAHTA. Et maintenant je lui laisse la parole…

« La conférence annuelle d’AHTA, l’Association Américaine d’Hortithérapie, a eu lieu les 11 et 12 octobre 2014 à Philadelphie ainsi qu’une journée pré-conférence qui a permis aux participants de visiter des établissements de santé offrant un programme d’hortithérapie :

  • Un centre de réhabilitation
  • Un centre pour personnes handicapées mentales
  • Un centre pour personnes handicapées moteurs
  • Le centre d’horticulture à Fairmount Park qui accueille des personnes en réinsertion

Des visites particulièrement intéressantes qui nous ont permis d’avoir un aperçu sur le contenu des différents programmes proposés et des espaces adaptés mis à disposition des patients.

Une conférence sur le thème de la pratique et de la recherche

GROWING OUR FUTURE – Practice and Research

Une conférence de grande qualité de par les intervenants et le contenu de leurs sessions. Un grand nombre de participants : 175 participants venant de nombreux états des US et également de l’international : Suède, Danemark, Japon, Taïwan, Bermudes et France.

La qualité et aussi le caractère d’ouverture et de simplicité aussi bien de la part des organisateurs, des intervenants que des participants ont facilité les échanges amicaux et fraternels qui donnent à ces rencontres une dimension d’exception.

MaryAnne McMillan, HTR, Présidente d’AHTA a d’abord introduit le Dr Stephen R. Kellert, connu pour ses nombreux ouvrages et recherches sur les thèmes de l’homme et la nature : « Le rôle de la nature dans la santé, productivité et bien-être » Les principes de la Biophilie.

Des intervenants d’horizons divers : hortithérapeutes, docteurs en médecine, professeurs d’université, paysagistes, designers ont présenté, dans les diverses sessions qui se sont déroulées sur ces deux journées, leurs travaux, recherches et expériences.

Des présentations qui reflètent le développement, l’intérêt et la reconnaissance croissante des bienfaits de l’hortithérapie qui va bien au-delà, de « thérapie par l’horticulture », mais principalement de l’influence de la nature sur l’homme et de l’homme sur la nature. Deux entités qui ne font qu’UN.

Des actions développées auprès de groupes de personnes  atteintes de différentes pathologies, maladies et troubles divers dans les domaines de la psychiatrie, gériatrie. Un programme avec des enfants et adolescents en difficulté (une expérience internationale menée à Hawaï), des programmes également auprès de prisonniers dans des centres pénitenciers.

Les intervenants ont présenté leurs actions, toutes basées sur des programmes spécifiques liées aux techniques de l’hortithérapie. Des programmes à long terme, pour la plupart encadrés par des professionnels, hortithérapeutes et docteurs en médecine.

Le Dr Kenshi Nishino nous a parlé de sa pratique de l’hortithérapie auprès de ses patients âgés et des recherches qu’il développe dans ce domaine, dans son hôpital au Japon où il travaille avec son équipe de jeunes médecins.

La richesse des thèmes abordés, le professionnalisme et la dimension de recherche apportée par la majorité des intervenants ont fait l’évènement et la particularité de cette conférence.

« AHTA is GROWING ». AHTA grandit grâce à l’efficacité de ses dirigeants, à la diversité des actions mises en œuvre de la part des membres du bureau, à la croissance du nombre de membres participant qui viennent apporter leur soutien et leurs expériences professionnelles.

J’ai eu grand plaisir à retrouver Teresia HAZEN qui avait répondu à mon invitation pour visiter l’hôpital Bretonneau et rencontrer les responsables du pôle gériatrie en 2010.

Martine, Teresia Hazen et Douglas Airhart

Martine, Teresia Hazen et Douglas Airhart

Teresia Hazen a un rôle majeur dans le développement d’AHTA. Hortithérapeute et coordinatrice à Legacy Health Hospital à Portland – Oregon depuis quinze ans. Elle supervise de nombreux programmes. Teresia a reçu de nombreuses récompenses et reconnaissance pour son travail remarquable dans le domaine de l’hortithérapie. Elle est un défenseur infatigable de l’incorporation des plantes, des jardins et de la nature dans les établissements de santé. Elle dispense, tout au long de l’année des cours et séminaires aux États-Unis et sur invitation au Japon. (Elle a également contribué à l’ouvrage Therapeutic Landscapes de Clare Cooper Marcus et Noami Sachs, NDRL)

Martine Brulé et Patty Cassidy

Martine Brulé et Patty Cassidy

Une belle ascension pour Patty Cassidy, Hortithérapeute , membre du bureau d’AHTA et présidente du Friends of Portland Memory Garden. Patty est l’auteur de « Gardening for Seniors », maintenant traduit en français. Dans le cadre de la conférence, elle a animé la session « communities of care » où elle a invité les participants à réfléchir sur les moyens de collaborer efficacement et d’échanger les informations sur les actions professionnelles de chacun. Gerrie H. Schmidt, membre du bureau a pris en charge le dispositif et a ouvert l’invitation également aux participants étrangers dont je fais partie.

Un projet de collaboration avec la France est en route, nous en reparlerons… »

Martine Brulé, praticienne en hortithérapie

Au début des années 2000, Martine Brulé, architecte-paysagiste de formation, ne peut s’empêcher de remarquer que les hôpitaux et maisons de retraite qu’elle visite manquent cruellement d’aménagement dans leurs espaces extérieurs. Le cadre de vie des patients en souffre. Elle s’attelle à changer la situation en abordant le sujet avec des directeurs d’établissements. « Il y avait bien sûr des difficultés financières et d’espace. Peu de maisons de retraite ont un espace suffisant », explique Martine Brulé. « Mais il y avait aussi une difficulté plus « philosophique ». Ce n’était pas encore dans l’air du temps il y a 10 ans de se remettre en question sur le sujet du bien-être. »

Un jeune s’occupe de son « jardin sur un plateau », un paysage méditerranéen miniature.

Dès 2003, elle créé l’Association Phyll’Harmonie dont le professeur Marcel Rufo, le très médiatique pédopsychiatre, prend la présidence. Un projet de jardin sur la terrasse de la Maison de Solenn à Paris n’aboutit pas pour diverses raisons. Mais aujourd’hui encore, elle travaille avec la Maison des Ados de Nice pour qui elle a créé un jardin. Suite à un déménagement qui la prive d’espace, elle poursuit avec des activités utilisant des matériaux vivants pour que les ados s’ouvrent à la créativité qui est en eux. Son entreprise, Viv’Harmonie, développe des ateliers nature à l’attention des personnes âgées, des personnes handicapées, des enfants et des adolescents, « à travers une approche du milieu vivant et du végétal en particulier, basés sur les apports de l’hortithérapie. »

La praticienne en hortithérapie peut guider les mains de la participante si besoin.

Face au manque d’espace, Martine Brulé imagine une solution. Cette membre de l’American Horticultural Therapy Association invente une solution pour amener le jardin aux participants même sans espace.  « Le jardin sur un plateau » permet de travailler à l’intérieur ou à l’extérieur. Un artisan le fabrique pour moi en résine et une solution plus « biologique » est à l’étude. Il est facile à transporter. Il sert de support pour créer un paysage miniaturisé pour que le patient s’évade et exprime sa créativité. Il est pérenne et peut suivre le rythme des saisons », énumère Martine. Elle le préfère à un véritable jardin pour les personnes âgées qui ne sont pas assez autonomes pour travailler dehors avec des outils.

Pendant deux ans, elle intervient à l’hôpital Bretonneau à Paris où elle intègre un programme du service de gériatrie pour des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer ou de maladies apparentées. Depuis 2007, elle travaille dans une maison de retraite, la résidence Korian Rives d’Esterel, à Fréjus avec des bienfaits cognitifs, psychiques, physiques et sociaux pour les patients. « On constate que les personnes sont de plus en plus dépendantes », avoue-t-elle, ce qui demande une adaptation des activités à la recherche d’une stimulation sensorielle.

Ces participants aux ateliers nature de Martine Brulé passent un moment au soleil entourés de plantes.

« Avec la matière naturelle, ce qui est différent des autres approches non médicamenteuses, c’est une réaction au vivant qui est immédiatement perceptible. Cette relation crée du bien-être », résume-t-elle. Elle constate qu’il y a aujourd’hui un engouement pour les « jardins thérapeutiques » dont elle estime que beaucoup ne présentent pas d’aspect thérapeutique : intégration dans le projet d’établissement et objectifs clairs servis par un programme. Une difficulté spécifique à la France, selon elle, est la difficulté à travailler en équipe. « L’hortithérapie n’est qu’un maillon de la chaine, c’est un travail d’équipe avec tous les autres spécialistes. »

En plus de ses ateliers, Martine Brulé dispense des formations, en collaboration avec l’association nationale des ergothérapeutes. Elle sent une forte demande de la part des personnels soignants, particulièrement en maisons de retraite. Pour elle, c’est là le gros chantier de l’hortithérapie en France.

Des ados en train de travailler au jardin.