Les jardins de l’hôpital pédiatrique Robert-Debré

juin 2019 (6)

Je parlerai principalement du jardin de la Maison de l’Enfant que j’ai pu visiter en compagnie d’Isabelle Launet et de la responsable de ce service. Isabelle suivait encore la première formation à l’agriculture urbaine de l’école du Breuil quand un ancien de la Pitié-Salpétrière où elle avait fait un long stage auprès d’Anne Ribes lui propose de participer à des animations pour les 30 ans de l’hôpital.

La Maison de l’Enfant est, au cœur de l’hôpital, un lieu différent. Comme une grande ludothèque, elle propose des activités auxquelles les petits patients viennent accompagnés de soignants ou de leurs parents et entourés par des animateurs et des éducateurs de jeunes enfants. La Maison de l’Enfant jouxte un espace ouvert transformé en jardin…

Après une longue période de bénévolat, Isabelle intervient dorénavant comme animatrice professionnelle deux fois par mois sans compter une visite hebdomadaire pour prodiguer quelques soins au jardin. A l’extérieur de l’hôpital, elle intervient dans une maison de retraite, auprès d’enfants dans un jardin dans le 20e arrondissement et à la Ferme de Paris. « L’activité rassemble les enfants et les ados, de 2 à 17 ans. Les parents sont les bienvenus car c’est un moment agréable avec leur enfant. Il n’y a pas de groupe pré-établi. A l’hôpital, c’est toujours le soin qui prime », explique-t-elle. « On commence avec quelques questions : Où vis-tu ? Qu’est-ce que tu aimes dans la nature ? Et puis je propose un atelier. Par exemple sur le vent. On écoute des enregistrements de vent dans les roseaux ou les maïs. On va toujours dans le jardin et on cueille des herbes pour la tisane. » Isabelle nous emmène faire un tour du jardin planté de vigne, de groseilles et de framboises, de pommiers et de poiriers, d’artémise, d’oreilles de lièvre, de basilic thaï, de sarriette, de verveine, de rosiers,…Il faut imaginer les petits patients déambulant dans le jardin, parfois avec leur équipement médical difficile à ignorer.

« On ne parle pas de maladie, c’est un sas de respiration. Mais le jardin fait parfois le lien avec le soin : on parle de tuteur, d’attelle, on utilise le vocabulaire du prendre soin. C’est assez rare que les enfants reviennent deux fois à un atelier. Mais ils peuvent revenir au jardin hors des ateliers. » Une extension est prévue. Le jardin petit à petit prend racine, avec l’aide des kinés qui arrosent. Un petit monde bienveillant au milieu de l’hôpital.

 

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En fait, à l’hôpital Robert-Debré, les jardins de soin se multiplient. L’association Jardins & Santé a récemment donné une bourse qui « a permis au service de cardiologie-néphrologie-hémodialyse de bénéficier d’une très belle terrasse entièrement aménagée et végétalisée. Une précieuse bouffée d’oxygène pour les patients, leur famille et les équipes soignantes ». Dites-moi si je me trompe, mais il s’agit du jardin perché conçu par Anna Six en 2017.

Un autre projet n’est pas thérapeutique par nature, mais attire l’attention. C’est le nouveau projet de ferme florale implantée depuis peu sur les toits de l’hôpital…La nature est très présente à l’hôpital Robert-Debré.

 

In other news…

  • Vous voulez soutenir le projet « Tous au jardin » des Jardins de l’Humanité? Découvrez ce projet en visitant le site de l’association. Le projet s’adresse « en priorité aux enfants malades et à leurs parents, aux personnes atteintes d’un cancer, à celles ayant subi des violences, mais aussi aux personnes isolées par leur âge ou leur situation familiale, sociale et professionnelle. » Ce beau projet est éligible au budget participatif des Landes et vous pouvez voter! Attention, il faut voter pour au moins trois projet. « Tous au jardin » se compose déjà de deux projets (un minibus et une yourte) et plusieurs autres projets visent à financer des jardins.
  • Quand des étudiants à l’EHESP (Ecole en Hautes Etudes en Santé Publique) de Rennes se penchent sur le besoin de formation des personnels soignants pour permettre l’implantation de la nature dans les établissements socio-sanitaires, on sait qu’on est sur la bonne voie. Dans ce mémoire disponible en ligne, les étudiants listent d’abord les bénéfices directs pour les patients et indirects pour le personnel de ces espaces verts thérapeutiques ainsi que les obstacles. Puis ils proposent un cahier des charges pour une formation professionnelle à destination du personnel soignant sur l’implantation d’espaces végétalisés à visée thérapeutique.

 

  • Les résultats d’une étude sur plus de 900 000 Danois sont clairs. Plus d’espaces verts autour de chez soi pendant l’enfance = moins de risque de troubles psychiatriques de l’adolescence à l’âge adulte ! Voici l’étude complète. Et le résumé traduit en français. Un conseil, utilisez DeepL.com si jamais l’anglais vous freine. « Grandir en milieu urbain est associé à un risque de développer des troubles psychiatriques, mais les mécanismes sous-jacents sont inconnus. Les espaces verts peuvent offrir des avantages sur le plan de la santé mentale et peut-être réduire le risque de troubles psychiatriques. Cette étude nationale couvrant plus de 900 000 personnes montre que les enfants qui ont grandi avec les niveaux les plus bas d’espaces verts avaient jusqu’à 55 % plus de risque de développer un trouble psychiatrique indépendant des effets d’autres facteurs de risque connus. Une association plus forte entre les espaces verts cumulés et le risque pendant l’enfance constitue la preuve qu’une présence prolongée d’espaces verts est importante. Nos résultats affirment que l’intégration des environnements naturels dans la planification urbaine est une approche prometteuse pour améliorer la santé mentale et réduire le fardeau croissant des troubles psychiatriques dans le monde ».

 

  • Depuis 3 ans, l’unité Flavigny du CH Le Vinatier à Lyon propose un groupe thérapeutique “Jardin et Nature”. Une expérience que Jérémie Cambon, infirmier dans cette unité de pédopsychiatrie, raconte dans ce texte.

 

Les Jardins de l’Humanité sortent de terre

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Les Jardins de l’Humanité dans la brume

Dans les Landes, à l’entrée de la ville de Saint-Vincent de Tyrosse et à 10 minutes de l’Atlantique, Estelle Alquier est en train de réaliser un rêve. Après avoir acquis une prairie de deux hectares, elle y construit depuis un peu plus d’un an 12 jardins thématiques. Un vaste projet qu’elle a baptisé les Jardins de l’Humanité et qui attire déjà des bénévoles réguliers pour l’aider dans son immense tâche. Porté par son association « Terres Océanes, Culture d’Humanité », le projet s’est fixé parmi ses objectifs principaux de « participer à la sensibilisation, la connaissance et la préservation de la diversité végétale et animale et du patrimoine local et régional auprès d’une large public. » Mais aussi de mener « des actions et pratiques écologiques, thérapeutiques, solidaires et respectueuses des hommes et de leur environnement. » Le potager Bonnot va, par exemple, servir à démontrer que la permaculture peut fournir une famille en fruits et légumes toute l’année sans trop de travail.

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Estelle Alquiler

Dans le jardin thérapeutique, il s’agira d’accueillir des enfants et des adultes. Déjà un premier projet avec le CCAS de Tyrosse pour permettre à une douzaine de bénéficiaires de venir jardiner régulièrement est en cours de montage. « J’aimerais organiser un pique-nique tous les trimestres pour qu’ils puissent faire visiter leur jardin à leur famille », explique Estelle qui propose par ailleurs des formations à l’hortithérapie aux personnels soignants en gérontologie, mais aussi auprès d’enfants et de jeunes. Autour du jardin thérapeutique, d’autres idées de partenariats sont à l’étude avec un EHPAD et une école primaire. Pour se familiariser avec l’expérience d’Estelle en matière de jardins thérapeutiques, direction son site dédié : après avoir suivi la formation à l’hortithérapie de Jean-Luc Sudres à l’université du Mirail à Toulouse en 2010, elle a déjà participé à la conception de plusieurs projets dont un jardin dans l’EHPAD « Notre Maison » à Biarritz.

Après avoir démarré le projet sur ses propres fonds et fait appel au financement participatif, Estelle est actuellement dans une phase de demandes de financements auprès de divers mécènes (la Fondation Yves Rocher Terre de femmes, Nature & Découvertes et d’autres). « Il reste encore quelques postes lourds comme le parking et les panneaux pédagogiques », confie cette ancienne journaliste, enseignante d’histoire-géographie et animatrice d’un centre sur l’environnement avec boutique bio et équitable. Mais aujourd’hui, les Jardins de l’Humanité sont devenus le projet qui donne un sens à sa vie. « Les bénévoles qui viennent régulièrement sont impressionnés. Moi, je trouve que cela n’avance pas assez vite. Ce projet est un aboutissement de mon parcours de vie depuis mes engagements à la fac. Mon côté militant est que les gens soient heureux. » Elle, elle le sait depuis qu’elle est enfant, être au jardin lui fait du bien. Les jeunes et les moins jeunes qu’elle accueille pour quelque temps viennent travailler sur son projet avec elle car ils cherchent leur voie et veulent essayer de nouvelles formes de solidarité.

Récemment, Sébastien Guéret de Formavert est venu visiter les Jardins de l’Humanité. Il a été bluffé par le souffle du projet et par la vision d’Estelle. On croise les doigts pour que l’inauguration se déroule, comme prévu, à la Saint-Jean en juin 2017. Pour contacter Estelle Alquier : terreoceane@yahoo.fr

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Le plan des Jardins

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Une structure en osier sépare le jardin médiéval du ruisseau en contrebas.

Patchwork

Au fil des semaines, j’accumule des références d’articles qui touchent, de plus ou moins près, au jardin de soin, à l’hortithérapie ou à la place de la nature pour les urbains. Beaucoup de ces liens circulent sur le groupe Facebook Jardins de soin ou me sont envoyés par des connaissances au courant de mon intérêt pour le sujet (merci Cléa, Nicole, Stew, Elise,…). Aujourd’hui, je les partage avec vous. Un peu en vrac. A vous de piocher dans ce qui vous intéresse.

Les Jardins de l’Humanité ont besoin de votre soutien

Les jardins de l'Humanité

Les jardins de l’Humanité

Estelle Alquier, présidente de l’association Terres Océanes, donne régulièrement des nouvelles des Jardins de l’Humanité. Voici son appel. « Les jardins de l’Humanité (19 jardins à vocation thérapeutique, historique, conservatoire, pédagogique et sociale) sont en cours de réalisation depuis septembre dernier (2015) dans le sud des Landes. Ce projet ambitieux est porté par l’association « terres océanes, cultures d’humanité » et avance grâce à l’implication de nombreux bénévolesvenus de toute la France. Nous arrivons au bout du budget de départ et pour continuer, nous faisons appel aux fondations, au financement public et à tous! Aucun doute qu’il verra le jour, cependant nous avons besoin de tous pour continuer. Une campagne de dons a démarré la semaine dernière sur le site helloasso, chaque don, dès 5 euros, est déductible des impôts et contribue à l’aboutissement de ce lieu hautement humain et écologique. Vous trouverez plus de détails sur notre site internet, accessible depuis le site de financement. »

Un jardin de soin à l’Institut Mutualiste Montsouris

Les acteurs en présence autour de ce jardin de soin inauguré en 2014: l’Institut Mutualiste Montsouris (département hospitalo-universitaire de psychiatrie de l’adolescent et du jeune adulte de l’Université Paris Descartes), l’association Jardin Art et Soin d’Alain Calender et le paysagiste Louis Benech.

Quantifier les bienfaits des espaces verts en ville

« Quand les élus, ou les promoteurs, regardent le budget d’un espace vert, c’est plutôt en termes de coûts que de recettes. Vu au mieux comme un plaisir apporté à l’habitant, au pire comme une onéreuse danseuse, le jardin n’est jamais crédité de ses bienfaits. Ils existent pourtant et peuvent même être chiffrés. Pour en avoir le cœur net, l’Union nationale des entreprises du paysage a demandé à l’institut Asterès de les recenser et, mieux encore, d’en faire une traduction monétaire. De cet exercice inédit se dégagent deux informations majeures : le jardin fait faire des économies en dépenses de santé et rapporte des rentrées en recettes liées à l’attractivité. » Lire l’article de Sybille Vincendon dans Libération.

Potagers en pied d’immeuble, jardins thérapeutiques en maisons de retraite

Une émission de Périphéries sur France Inter dédié à un jardin vivrier dans le quartier Bel Air de Montreuil. Montreuil, cela vous rappellera peut-être le projet de Yves-Aubert Alonzeau, l’un des gagnants du concours d’Avenir de la Fondation Truffaut en 2016. Décidemment, on jardine beaucoup à Montreuil.

Le site Ehpadeo, créé par deux frères pour aider les personnes âgées et leurs familles, dédie une rubrique aux jardins thérapeutiques en mettant en avant des projets dans plusieurs maisons de retraite.

Des jardins qui rapprochent

En Suisse, cette initiative qui date de 2011 permet à des migrants et à des réfugiés de s’insérer au travers d’une parcelle de jardin. En Alsace-Lorraine, j’ai entendu parler de trois jardins interreligieux de la Meinau, de Valff et de Saverne. Mais peu d’information filtre sur Internet malheureusement.

L’intelligence émotionnelle des plantes

« Est-ce que les plantes sont en résonnance avec l’Homme et le règne du vivant ? » C’est la question posée dans l’émission de radio Retour aux Sources à partir du livre « L’intelligence émotionnelle des plantes » de Cleve Backster avec deux invités autour de la table de Joëlle Vérai : Bénédicte Fumey qui est porte-parole du Pacte civique et Jacques Collin, ingénieur, écrivain et conférencier. J’avoue que je n’ai pas encore écouté l’émission jusqu’au bout…

Encore plus méconnue que l’hortithérapie, la bibliothérapie

« Inspirée par la philosophie grecque, plébiscitée par Marcel Proust à la fin du XIXè siècle et complètement reconnue aujourd’hui en Grande Bretagne, la bibliothérapie se fait attendre en France. Pourtant, l’apaisement des maux de l’âme ou le renforcement du bien-être psychologique par la lecture résonnent presque comme des effets on ne peut plus évidents. Il faut dire que ces pouvoirs prêtés au livre ont des origines très anciennes et sont désormais scientifiquement prouvés. » Cet article très complet fait un bilan historique et contemporain de la lecture comme acte thérapeutique.

Le coin anglophone : une maternelle dans les arbres, des ordonnances de nature et un nouveau livre

Une jeune élève à la Fiddleheads Forest School à Seattle (photo du New York Times).

Une jeune élève à la Fiddleheads Forest School à Seattle (photo du New York Times).

A Seattle, une maternelle installée dans University of Washington Botanic Gardens fait classe dans la forêt. Un article du New York Times raconte l’expérience de Fiddleheads Forest School. On dirait que l’appel de Richard Louv dans son célèbre livre Last kid in the woods a été entendu.

De San Francisco à Washington, des médecins américains prescrivent des marches dans la nature à leurs patients. Pas seulement pour faire de l’exercice, mais aussi pour raviver leur connexion avec la nature et stimuler leur cerveau. La pratique existe aussi en Angleterre. En France, j’ai entendu une professionnelle de la santé conseiller à une patiente de marcher en pleine conscience à travers un parc qui se trouve quotidiennement sur son chemin…

David Kamp a fondé Dirtworks Landscape Architecture à New York pour explorer l’interaction de la nature, de la santé et du bien-être. Il vient juste de publier Healing Garden, un livre qui mêle théorie et pratique. Je ne l’ai pas lu. La description du livre n’est pas sans rappeler Therapeutic Landscapes de Clare Cooper Marcus et Naomi Sachs.