La revue Jardins consacre un numéro au soin

Marco Martella, fondateur de la revue Jardins aux éditions du Sandre (copyright Sébastien Soriano, Le Figaro)

Marco Martella, fondateur de la revue Jardins aux éditions du Sandre (copyright Sébastien Soriano, Le Figaro)

Il était en préparation depuis plusieurs mois et on attendait sa sortie avec impatience. Il est disponible en librairie et vous pouvez le commander sur le site des Editions du Sandre. Lui, c’est le numéro 6 de la revue Jardins que son fondateur Marco Martella consacre aux jardins qui soignent. Marco Martella, qui est historien et essayiste, a traduit et préfacé le traité du jardinier-philosophe anglais Jorn de Précy Le Jardin perdu. Il est également auteur du texte qui accompagne le court-métrage Empreintes, une promenade de 30 ans dans le Jardin des Tuileries réalisée par Hervé Bernard.

Marco Martella introduit ce numéro par ces mots. « Pourtant, le jardin ne nous offre-t-il pas la possibilité de rétablir un bien-être perdu et à reconquérir sans cesse ? Si nous nous éloignons, un moment, de la réalité quotidienne en ce lieu toujours propice à la vie, n’est-ce pas pour recouvrer un équilibre avec le monde, équilibre peut-être rêvé mais dont nous portons, enraciné en nous, le souvenir ? » ou encore « Plus que jamais, nous demandons aux jardins de nous remettre en présence d’une nature vivante, de nous indiquer, à nous les déracinés, coupés de la terre et donc de nous-mêmes, le chemin du retour, afin de restaurer une unité. Et cela par le geste le plus naturel qui soit, l’un des plus anciens que nous ayons appris : soigner. » Et enfin, « Le jardin soigne le jardinier qui soigne ses plantes. C’est un échange de bons procédés, une sympathie ou une solidarité instinctive qui lie entre elles toutes les formes de vie. » Cela devrait vous rappeler la biophilie évoquée la semaine dernière…

JardinsParmi les 14 auteurs qui ont contribué de beaux textes pour ce numéro, les lecteurs de ce blog en reconnaitront plusieurs, de Michel Racine à Jean-Paul et Anne Ribes, de Jay Rice à Romain Rioul, de Bernard Beck à Sylvain Hilaire. Mais que de belles découvertes aussi. Dans un monde où le dehors est devenu étrange et étranger, le paysagiste Michel Péna milite par exemple pour que l’œuvre du paysagiste considère le public comme sujet qui peut vivre l’amour du paysage de façon charnelle. Les auteurs apportent des perspectives intellectuelles ou sensuelles, françaises ou d’ailleurs (voir l’entretien « Ethnopharmacologie, chamanisme et thérapeutique » avec le docteur Jacques Fleurentin). Vous qui vous intéressez aux jardins qui soignent, vous qui peut-être jardinez avec des malades, vous pourriez très bien continuer sans lire ces textes. Mais ce serait dommage de se priver de ces réflexions riches et multiformes. Il y a fort à parier qu’un de ces textes fera écho en vous, vous ouvrira une piste insoupçonnée, nourrira votre pratique.

Je ne vous mentirai pas. Je n’ai pas encore lu la revue entière, mais je voulais vous en parler aussi vite que possible. Elle a pris place sur ma table de chevet aux côtés de Walden de Henry David Thoreau, acheté impulsivement samedi dernier comme un antidote au chaos ambiant. Je suis impatiente de découvrir progressivement l’un et l’autre.

 

« En travaillant dans le jardin, les prisonniers reprenaient espoir »

Jay Rice est un psychologue américain que j’ai rencontré pendant une formation du Horticultural Therapy Institute en 2012. Depuis plusieurs années, il intervient régulièrement aux côtés de Rebecca Haller, la fondatrice du HTI. Car pour sa dissertation en psychologie dans les années 1990, Jay a travaillé dans un jardin bio géré par la prison du comté de San Francisco pour des prisonniers dépendants de substances chimiques. Une expérience de jeunesse qui a laissé des marques profondes dans sa pratique de psychologue.

La semaine dernière, Jay était de passage à Paris et nous avons pu passer un peu de temps ensemble sur les bords de la Seine. Dans ces quatre vidéos, il nous raconte ce qu’il a découvert dans son expérience avec les prisonniers sous dépendance, comment il s’inspire de la nature pour aider ses patients et quelle est sa contribution aux formations du Horticultural Therapy Institute. En VO.

Moins de dépression, plus d’espoir

En résumé, Jay explique que pour des gens traumatisés très tôt dans la vie, comme l’étaient nombre de ces prisonniers, il est important de vivre une expérience où ils peuvent se former une image positive d’eux-mêmes. Dans la 2e vidéo, il affirme que son étude a montré que les participants quittaient la prison avec moins de problèmes : moins de dépression, moins d’anxiété. Et une voie pour le futur : plus d’espoir dans leur vie débouchant sur une envie de commencer un traitement.

 

Un psychologue enrichi par l’approche de la nature

Comme le raconte Jay dans cette vidéo, il utilise les cycles naturels de croissance pour aider les gens à envisager leur vie. Pour lui, la nature est un miroir qui nous explique où nous en sommes dans notre croissance. Comme un arbre qui semble mort en hiver, mais dont les racines travaillent sous la surface…

 

La formation des futurs hortithérapeutes

Jay veut que ces futurs soignants réfléchissent à la qualité de la relation avec les plantes. Pour lui simplement utiliser les plantes comme des outils pour aider les gens n’est pas suffisant. « Les plantes sont des êtres vivants qui cultivent les humains autant que les humains les cultivent….Les plantes ont leur propre enseignement à nous apporter sur le cycle de la vie…Quand nous pensons à notre vie en tant que cycle, les plantes peuvent nous apprendre comment vivre notre vie. »