La réalisatrice indépendante Cintia Cabib a tourné Community of Gardeners pour montrer la diversité des jardins collectifs dans la capitale américaine, un centre urbain qui recèle finalement une grande richesse d’espaces consacrés au jardinage. Comme l’indique en concentré le synopsis, « le film explore le rôle vital de sept jardins collectifs de Washington, en tant que sources de nourriture saine et nutritive, d’endroits de guérison, de classes de plein air, de liens vers leur patrie pour des immigrants, de centres d’interaction sociale et d’oasis de beauté et de calme dans des quartiers du centre-ville. » Même si Washington est plus verte que New York, la majorité de la population vit en appartement et n’a pas accès à un jardin…
Bien que ni la documentariste, ni ses interlocuteurs n’utilisent souvent le terme de « thérapie », il est clair que ces jardins contribuent de multiples façons au bien-être physique, psychologique et social des jardiniers. « La femme qui dirige l’association de Fort Stevens Community Garden se bat contre le cancer. Elle dit que le jardin l’aide car elle oublie sa maladie quand elle jardine », explique Cintia Cabib. « Dans une école qui accueille des enfants handicapés, le jardin, accessible en fauteuil roulant, est une de leurs rares opportunités d’être dehors et de faire des expériences sensorielles. »
Fondé en 1971 au sein du US National Arboretum, le Washington Youth Garden est une « salle de classe vivante » pour les jeunes de la ville qui viennent y prendre des leçons sur l’environnement et l’alimentation. « Les enfants m’ont dit « Je n’avais jamais rien vu pousser ». Pour des enfants qui vivent en ville, le simple d’être dehors et de travailler dans la boue est merveilleux », raconte la réalisatrice. Pour une fratrie au passé difficile, ce jardin est même devenu un refuge. « Une famille de quatre enfants, deux garçons et deux filles, a été divisée à la mort de leur mère. Des profs qui connaissaient les enfants les ont inscrits à des programmes au Washington Youth Garden pour leur donner un endroit où se retrouver. »
Autre jardin, autres bénéfices. « Au 7th Street Garden qui a maintenant déménagé et s’appelle le Common Good City Farm, les participants bénévoles reçoivent des fruits et légumes en échange de leur travail au lieu d’aller à une épicerie sociale chercher de la nourriture. Ils considèrent que le jardin leur redonne leur dignité. » Dans son documentaire, Cintia Cabib, une Argentine qui vit dans la région de Washington, explique l’histoire des « community gardens » aux Etats-Unis, y compris des « Victory gardens » pendant les deux dernières guerres mondiales. « En temps d’incertitude économique, cultiver sa nourriture redevient réconfortant », explique Cintia. « Les jardins collectifs ont connu des hauts et des bas. Ils étaient très à la mode dans les années 60 et 70. Chicago, New York, Philadelphie étaient à la pointe. Washington s’y est mis. Maintenant, ils reviennent en force. On considère un jardin collectif comme tout lopin cultivé par un groupe et j’y inclus les jardins d’écoles. » La ville de Washington organise d’ailleurs depuis plusieurs années Rooting DC, une journée pratique sur le thème du jardinage urbain.
Community of Gardeners est sorti en 2011, « juste au bon moment » comme le reconnaît Cintia. Elle se rend à de nombreuses soirées autour du film où elle explique comment lancer un jardin collectif. Parfois, des personnes interviewées dans le film viennent parler avec elle. Le film a également été diffusé sur des stations de télévision PBS, la chaine publique américaine, et dans de nombreuses écoles. « J’espère inspirer des gens à créer des jardins collectifs. A Washington, il y a encore des coins qui sont des déserts alimentaires (food deserts). La question de l’alimentation et de l’obésité sont des questions de société », explique Cintia. Quand on parle de lutte contre l’obésité, impossible de ne pas mentionner la jardinière la plus connue de Washington, Michelle Obama dont j’avais décrit le jardin il y a quelques mois.
Dans ces cartons, Cintia a d’autres projets liés à ce thème. « Je veux tourner des vidéos plus courtes sur des sujets comme la possibilité d’utiliser les « food stamps » (le programme d’aide alimentaire américain qui a explosé à cause de la crise avec 47,1 millions de bénéficiaires, soit près de 20% de la population, NDRL) dans les marchés fermiers. Il y aussi des « truck farm », des programmes d’éducation qui installent une ferme dans un camion et se déplacent dans les écoles. » La matière et l’enthousiasme ne manquent pas.
Regardez la bande annonce de Community of Gardeners.