Une année riche

Est-ce que j’ai tellement le nez dans le guidon que je perds tout recul ? Ou bien constate-t-on une réelle accélération du nombre d’études sur le lien entre nature et santé, doublée d’un intérêt médiatique de plus en plus marqué pour le sujet ?

En tout cas, pour clore cette année qui restera pour moi marquée par la création de la Fédération Française Jardins Nature et Santé, voici quelques pistes et autres arguments, un peu d’eau apportée à notre moulin.

 

Exposition à la nature et santé mentale

Le mois dernier, je vous parlais d’une étude danoise qui avait montré que plus d’espaces verts autour de chez soi pendant l’enfance se traduisait par moins de risque de troubles psychiatriques à l’adolescence et à l’âge adulte. Elle est loin d’être la seule à établir cette corrélation.

Cette autre étude publiée en 2019 rapporte des résultats similaires en analysant des données issues de quatre villes en Espagne, Hollande, Lituanie et Angleterre. « Notre étude a montré que de faibles niveaux d’exposition à des milieux naturels extérieurs chez les enfants sont associés à une mauvaise santé mentale à l’âge adulte, ce qui appuie l’appel lancé aux décideurs pour qu’ils améliorent la disponibilité des milieux naturels extérieurs pour les enfants », concluent les auteurs de cette étude parue dans l’International Journal of Environmental Research and Public Health.

 

Mindfulness et nature

Dorthe Djernis (photo Tina Agnew)

 

« Nature-based mindfulness – Investigation of bringing mindfulness into natural settings ». C’est le titre de la thèse défendue par Dorthe Djernis, sous la direction d’Ulrika Stigsdotter qui travaille à Therapy Garden Nacadia. Si on ne peut pas accéder à la thèse, on peut cependant lire cette revue systématique et méta-analyse de 25 études sur l’intégration de la pleine conscience dans un environnement naturel qui en est la base. « La pleine conscience dans la nature sauvage semble être plus bénéfique que la pleine conscience dans les milieux plus cultivés, mais l’importance du lieu doit être étudiée plus en profondeur. »

 

Nature Sacred

Une ressource anglo-saxonne intéressante. Est-ce que Nature Sacred peut nous donner des idées en France ? Mais d’abord qu’est-ce que c’est ? « Nature Sacred existe pour inspirer, informer et guider les communautés dans la création d’espaces verts publics appelés Sacred Places, conçus pour améliorer la santé mentale, unifier les communautés et engendrer la paix. Depuis plus de 25 ans, Nature Sacred s’est associé à plus de 130 communautés à travers le pays pour infuser la nature proche dans des endroits où la guérison est souvent la plus nécessaire : quartiers urbains en détresse, écoles, hôpitaux, prisons et plus encore. Grâce à un processus de collaboration communautaire et à un modèle de conception fondé sur des données probantes, chaque Sacred Place est lié par un objectif commun : reconnecter les gens à la nature de manière à favoriser la réflexion, à rétablir la santé mentale et à renforcer les collectivités. »

En octobre, Nature Sacred a publié un rapport, « The Healing Power of Nature », qui compile les preuves scientifiques les plus récentes et les plus puissantes qui soulignent les bienfaits de la nature pour la santé.

 

Deux heures par semaine dans la nature

Mathew White

« Passer deux heures par semaine dans la nature est bon pour la santé et le bien-être ». C’est le titre de cet article publié sur le site The Conversation par Mathew White, professeur de psychologie de l’environnement à l’Université d’Exeter et co-auteur d’une étude en cours sur 20 000 sujets.

« Nous avons découvert que ceux qui consacrent au moins deux heures par semaine dans la nature ont tendance à se trouver davantage « en bonne santé » ou encore d’éprouver un plus haut niveau de bien-être que ceux qui ne passent pas de temps dans la nature. Ceux qui y passent un peu de temps, mais moins de deux heures, ne sont pas plus susceptibles de se sentir en bonne santé et d’éprouver un bien-être que ceux qui ne s’y exposent pas du tout….Plus significatif peut-être, cette tendance du « seuil des deux heures » se retrouve dans tous les échantillons examinés: vieux comme jeunes adultes, hommes et femmes, urbains et campagnards, pauvres comme riches, et même chez ceux atteints d’une maladie à long terme ou d’un handicap. »

 

Un jardin pour des personnes fragiles vivant à domicile

Ce jardin thérapeutique, créé par l’AMSAD de la Haute-Gironde, une association de maintien à domicile, est original. Ce qui frappe également, c’est que le projet est décrit sur un site animé par la région Aquitaine et l’ARS. « 750 personnes, tous publics confondus, ont fréquenté ce jardin 2018 et j’ai animé 200 séances accompagnées, plutôt en individuel, et dans une logique de projet personnalisé. Venir au jardin, c’est se mettre en activité, en éveil, en lien social… », explique Pascal Pennec, le responsable du jardin d’Oreda qui est à la fois éducateur spécialisé, paysan et jardinier. Allez lire la suite. Et pour en savoir plus, le site de l’AMSAD.

 

Comment une personne handicapée perçoit-elle un jardin ?

Cette vidéo de 30 minutes vous le fait découvrir de l’intérieur. Le YouTubeur Zygop s’est promené dans le parc de la Tête d’Or à Lyon avec Fannie qui est en fauteuil roulant. Elle explique comment se déplacer et apprécier les plantes lui est difficile dans un espace dont la conception n’est pas adaptée.

 

Etes-vous un « néotransitionneur »?

Le jargon est un peu marketing, mais cet article pourrait vous « parler ». Est-ce que la solastalgie ou l’éco-anxiété, une forme de détresse psychique et existentielle causée par les changements environnementaux, est en train de devenir un sujet de santé publique?

 

Oliver Sacks parle de jardins

Oliver Sacks au New York Botanical Gardens (photo de Billy Hayes)

 

Je ne me lasse jamais de citer Oliver Sacks, ici et . Grâce à cet article de Brainpickings, laissons-lui le mot de la fin pour cette année.

« En tant qu’écrivain, je trouve les jardins essentiels au processus créatif ; en tant que médecin, j’emmène mes patients dans les jardins autant que possible. Nous avons tous eu l’expérience d’errer dans un jardin luxuriant ou un désert intemporel, de marcher au bord d’une rivière ou d’un océan, ou d’escalader une montagne et de nous retrouver à la fois calmes et revigorés, engagés dans notre esprit, rafraîchis dans notre corps et notre esprit. L’importance de ces états physiologiques sur la santé individuelle et communautaire est fondamentale et de grande portée. En quarante ans de pratique médicale, je n’ai trouvé que deux types de « thérapie » non pharmaceutique d’une importance vitale pour les patients atteints de maladies neurologiques chroniques : la musique et les jardins. »