Joyeuses fêtes

Oliver Sachs

Oliver Sachs

En lisant L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau, le récit de cas qui ont marqué le neurologue anglais Oliver Sachs et qu’il raconte de façon très abordable et très humaine, je trouve des passages que j’ai envie de partager ici.

 

Jimmie et William au jardin

A propos de Jimmie, le « marin perdu » souffrant d’une amnésie qui a effacé plus de trente ans de sa vie, Oliver Sachs écrit ceci : « Le fait d’avoir vu Jimmie à la chapelle m’ouvrit les yeux sur l’existence d’autres domaines où l’âme a droit à la parole, où elle se trouve retenue et apaisée par l’attention et la communion. Jimmie faisait preuve de la même profondeur de concentration et d’attention pour ce qui touchait à la musique et à l’art : je remarquai qu’il n’avait aucune difficulté à « suivre » un morceau de musique ou des pièces de théâtre simples, parce que chaque moment artistique renvoie à d’autres moments et les contient. Comme il aimait le jardinage, il avait pris en charge quelques travaux du jardin. Au début, il avait l’impression d’entrer chaque matin dans un jardin inconnu, puis, pour je ne sais quelle raison, celui-ci lui devint plus familier que l’intérieur de la maison. Il ne s’y perdait presque plus jamais, ne s’y sentait plus désorienté; je pense qu’il associait cet espace à des jardins de son enfance dans le Connecticut, jardins qu’il avait aimés et dont il gardait le souvenir. »

William Thompson est un patient souffrant d’un syndrome amnésique de Korsakoff se caractérisant par des affabulations. « Nos efforts pour « reconnecter » William, en revanche, échouent tous – ils augmentent même sa pression affabulatrice. Mais, si nous abandonnons nos efforts et le laissons à lui-même, il erre dehors, dans le jardin entourant l’hospice; ce jardin calme ne lui demande rien; si bien qu’il peut au sein de cette quiétude, retrouver sa propre quiétude. La présence d’autres personnes l’excite et l’agite, le force à un bavardage incessant et frénétique, à un véritable délire au moyen duquel il se cherche et se fabrique une identité; les plantes de ce tranquille jardin, cet ordre sans rien d’humain et qui n’attend rien de lui, permettent à son délire de se reposer et de s’apaiser; leur autosuffisance, leur plénitude sereine, non humaine, lui rendent l’indépendance et la quiétude en lui offrant (en deçà ou au-delà de toute identité ou relation humaine) une communication profonde et silencieuse avec la nature, et restaurent en lui le sens d’une appartenance au monde, d’une réalité. »

Joyeuses fêtes et à bientôt.

 

 

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