Le bonheur

Le bonheur est dans le jardin, certes. Mais qu’est-ce que le bonheur ? Je n’ai jamais pris le temps d’explorer cette question depuis six ans que ce blog a vu le jour. Il est peut-être temps d’y réfléchir…

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Mes deux garçons, heureux, dans un jardin au Canada il y a plusieurs années.

 

Il y a quelque semaines, un CATTP (Centre d’activité thérapeutique à temps partiel) m’a demandé d’animer un débat sur le bonheur avec un groupe de patients. L’équipe avait préparé le débat en regardant une conférence de Christophe André sur ce sujet dont il est spécialiste. Franchement, intervenir après Christophe André est intimidant. Mais en fait, je n’étais pas là pour étaler ma (petite) science, même si mon intérêt pour la psychologie positive était sans doute la raison qui m’avait valu cette invitation. J’étais là pour animer le débat avec la vingtaine de personnes présentes, des usagers ayant des problèmes de santé mentale dont je ne connaissais pas les détails. Et tant mieux car je pouvais ainsi les considérer d’abord comme des personnes, plutôt que comme des étiquettes pathologiques. Le débat fut très animé. A part quelques timides, la plupart des présents avaient des idées bien affirmées et des questions très pertinentes. Au bout de deux heures, nous avons dû mettre fin à la discussion qui aurait pu continuer encore un bon moment. Nous avons tous une petite idée sur le bonheur, si nous nous arrêtons quelques instants pour y réfléchir.

Des micro moments de bonheur

Tout d’abord, je vous renvoie vers la conférence de Christophe André (partie 1 et partie 2). Une conférence pleine de faits scientifiques et de bon sens. Où l’on apprend que le bonheur est un état vers lequel on tend sans cesse plutôt qu’un but qu’on peut atteindre une fois pour toutes. Une équation entre ressentir un certain bien-être et en avoir conscience. Sinon on passe à côté du bonheur et on ne le reconnaît que quand il est parti.

Le bonheur, c’est une série de moments fuyants et éphémères que la psychologue américaine Barbara Fredrickson appelle des « micro moments ». Dans sa théorie de l’élargissement constructif des émotions positives – broaden and build theory of positive emotions en anglais– elle considère que toutes les émotions positives élargissent notre façon de penser, le répertoire de nos idées et de nos actions. Je trouve cette idée très séduisante.

A quoi sert le bonheur ? Christophe André le décrit comme un carburant qui nous permet de résister à la tragédie humaine et à la certitude que nous mourrons un jour, un carburant qui rend la vie non seulement supportable, mais aussi appréciable. On peut ici distinguer l’hédonisme qui fait du plaisir le bien suprême et l’eudémonisme qui fait du bonheur la conséquence d’une vertu parfaite et d’une existence accomplie (ce qu’on appelle aussi « the good life » ou la vie bonne).

Les points communs des gens heureux 

Les gens heureux ont quelques habitudes, a-t-on remarqué. Ils sont plus enclins à accomplir des actes de gentillesse (random acts of kindness), ils font de l’exercice et cultivent leur bien-être physique. Ils sont mus par une motivation intrinsèque : ils agissent dans le sens de leurs valeurs et font ce qu’ils aiment au point de perdre la notion du temps et d’eux-mêmes. C’est ce que Mihaly Csikszentmihalyi, l’autre père de la psychologie positive avec Martin Seligman, appelle le « flow ». Ils sont animés par une vision positive faite d’optimisme, de gratitude d’espoir, de capacité à pardonner et de bienveillance envers soi. Ils possèdent certaines forces de caractère (la créativité, l’humour, la persévérance, l’humilité, le courage, la curiosité, l’appréciation de la beauté) que l’on peut explorer chez soi sur ce site.

Mais il ne faut pas croire que nous sommes naturellement soit des surdoués, soit des ratés du bonheur. Bien sûr, il existe des obstacles au bonheur. Christophe André en liste quelques-uns : l’anxiété et la dépression, des prédispositions génétiques qui laissent cependant toujours une marge de manœuvre, certaines leçons de l’enfance, le manque de soutien social, notre mode de vie matérialiste avec la publicité qui fait des raccourcis entre consommation et bonheur, le règne de l’image, la pléthore de choix qui nous assaillent,…Mais chacun de nous peut cultiver le bonheur. Sans tomber non plus dans la dictature du bonheur. Les gens heureux ne fuient pas les moments difficiles, ils les accueillent et les acceptent.

Et le jardin dans tout cela?

Et nous voici de retour au jardin. Pourquoi est-ce que ce blog s’appelle Le bonheur est dans le jardin ? C’est un nom qui sonnait bien quand je l’ai choisi il y a six ans, mais qui a pris tout son sens au fil du temps pour moi. Parce que dans un jardin, malade ou bien-portant, on vit beaucoup de moments qui boostent le bonheur directement ou en combattant certains obstacles au bonheur. Des moments où on est pris dans le « flow », la tâche qui nous motive au point de s’oublier dans l’activité. Des moments de pleine conscience. Des moments de lien social où on rompt l’isolement. Le jardin permet une activité physique (rappelez-vous, l’activité physique est une source de bonheur), qui est en plus pleine de sens. Au jardin, on cultive aussi l’estime de soi, la motivation, l’attention, l’espoir, la gratitude, la bienveillance, la connexion au temps, à l’espace et tant d’autres choses…

 

Les jardins qui soignent dans les média

Et pendant ce temps-là, l’idée que les jardins soignent fait son bonhomme de chemin. Chaque émission de radio, chaque article sur le sujet répand l’idée que le jardin est un remède naturel si accessible. Merci à Didier, à Paule et à Vitalija.

Les jardins thérapeutiques sur France Inter

Nature en ville et jardin « didactique » sur le toit d’un hôpital en Suisse

Un jardin thérapeutique dans l’hôpital psychiatrique St-Jean-de-Dieu à Leuze-en-Hainaut en Belgique

Un potager contre la désespérance sociale et la criminalité à Marseille

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